On a tant écrit sur la Pucelle d’Orléans. On estime à 22 000 le nombre de livres consacrés à Jeanne d’Arc qui sont répertoriés en France. A partir du 19e siècle, ceux-ci ont contribué à faire de Jeanne d’Arc une figure emblématique du patriotisme, de la résistance et du courage. On a enseigné aux petits Français sa remarquable chevauchée entreprise pour rétablir l’autorité du Dauphin Charles VII sur le trône de France. Le destin de cette héroïne commence dans le petit village de Domrémy. Entre Neufchâteau et Vaucouleurs, entre les départements des Vosges et de la Meuse. Cet article vous propose de découvrir le pays natal de Jeanne d’Arc en Lorraine.
Il s’agit d’un article parsemé de « Retour en arrière… à l’époque de Jehanne » avec de nombreuses suggestions de visites et moult anecdotes. Et surtout, en fin d’article, je ne manquerai pas de soulever des questions quant au mystère de la bergère devenue soldat… et si, après tout, ce pan de l’Histoire de France n’était pas celui que l’on croit ?
Un mot sur Jeanne d’Arc, la Pucelle de Domrémy
Vouloir écrire un article sur Jeanne d’Arc, moi qui suis d’obédience protestante, c’est un comble n’est-ce-pas ? Mais dès qu’il y a de l’Histoire dans l’air, moi je suis partant. Et là, quelle histoire… la grande Histoire.
Plantons le décor : Guerre de Cent Ans. Les ‘Anglois’ occupent Paris et une grande partie de l’Ouest de la France. Y-a-t-il quelqu’un sur la brèche pour mettre le dauphin Charles VII sur le trône de France et sauver la situation ?
Eh ben oui, y-a quelqu’un. Une personne qui est tout à fait disposée à le faire.
Une jeune paysanne.
Venue de nulle part…
D’un petit village aux confins du royaume dont personne ne connait le nom.
Une donzelle qui aurait entendu des voix…
Elle s’appelle Jeanne. Jeanne d’Arc, de Domrémy.
Mais où sommes-nous exactement ? En Lorraine, en Champagne, en Bourgogne, dans le Barrois, en France ???
Jeanne d’Arc était-elle lorraine ?
Aujourd’hui, ça ne fait aucun doute puisque Domrémy-la-Pucelle, son village de naissance, fait partie de la Lorraine.
Mais qu’en était-il à sa naissance ?
Et c’est là que les choses se compliquent. Car Domrémy se trouvait aux confins de la Lorraine et du royaume de France. Le village était d’ailleurs divisé en deux parties :
- la partie nord appartenait au comté de Champagne (rattaché au roi de France depuis 1284). Elle relevait de la châtellenie de Vaucouleurs.
- la partie sud (dont la maison de Jeanne) faisait partie du Barrois mouvant (relevant du domaine royal de France depuis 1301). Le duc de Bar était vassal du roi de France pour ses terres situées à l’ouest de la Meuse.
Un petit ruisseau marquait la frontière, qui longeait justement la maison des D’Arcs.
Dans tous les cas, à l’époque de Jeanne, Domrémy n’appartenait ni au duché de Lorraine, ni aux Trois Evêchés de Toul, Metz et Verdun.
Toutefois, sur le plan spirituel, la paroisse relevait du diocèse de Toul.
Alors, est-ce que Domrémy est en Lorraine ?
En 1571, le village de Domrémy fut officiellement rattaché au duché de Lorraine et par voie de conséquence, au Saint-Empire romain germanique. Ce n’est que deux siècles plus tard, à la mort du roi Stanislas en 1766, que le village redevint français, sous le règne de Louis XV. En même temps que Nancy et tout le duché de Lorraine.
Jeanne d’Arc en Lorraine… l’itinéraire !
Voici un petit itinéraire qui nous emmène sur les traces de Jeanne d’Arc en Lorraine. Et bien sûr, la première étape du parcours est le village Domrémy, là où tout a commencé.
Domrémy-la-Pucelle
Le village bénéficie d’une réputation internationale car c’est ici que Jeanne d’Arc est née.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
D’après la tradition la Pucelle y naquit le 6 janvier 1412, pendant l’Epiphanie – mais comme Jeanne elle-même ne connaissait pas son âge exact…
L’ÉVÊQUE. – Quel âge avez-vous ?
JEANNE. – Comme il me semble, à peu près dix-neuf ans.
(Procès de Jeanne d’Arc à Rouen, séance du 21 février 1431)
« Dans mon pays, on m’appelait Jeannette et en France Jeanne. J’ai été baptisée en l’église de Domrémy. Mon père est nommé Jacques d’Arc et ma mère Isabeau. Messire Jean Minet me baptisa. Ma mère m’a appris Pater Noster, Ave Maria et Credo ; c’est d’elle que j’ai appris ma croyance« . (Jeanne d’Arc lors de son procès à Rouen)
Ce qu’il faut voir à Domrémy
La petite commune de Domrémy-la-Pucelle (Vosges) est arrosée par une Meuse encore jeune. On n’y recense qu’une petite centaine d’habitants et pourtant, le village est connu dans la France entière. En traversant la rue principale, on se rend compte qu’il s’agit d’une localité sans grand intérêt… mais ne partez pas de sitôt car deux édifices et un petit musée méritent qu’on s’y attarde.
L’église Saint-Rémy
De style gothique, l’église remonte au 13e siècle. Elle dépendait alors de la paroisse de Greux (voir ci-dessous) et du diocèse de Toul.
Cette église à trois nefs basses a été dédiée à Saint Remi, vous savez, l’évêque de Reims qui baptisa et sacra le premier roi de France, Clovis 1er en 481.
En 1824, le sanctuaire fut remanié sens dessus-dessous. Le chœur fut placé à l’emplacement de l’ancien porche et inversement ! Les clefs de voûtes indiquent les années de restauration : 1582, 1585, 1698 et 1904.
Des souvenirs de la Pucelle à la pelle…
Comme on s’y attend, l’église est ornée de nombreuses représentations et souvenirs de la Pucelle (voyez les sculptures et les vitraux de 1955 retraçant des épisodes de sa courte vie).
L’église a vu le baptême de Jeanne d’Arc en 1412. Le transept gauche abrite les fonts baptismaux.
A l’entrée, remarquez un bénitier du 13e siècle. Puis, sur un pilier figure une fresque représentant le martyre de Saint Sébastien. Datant de 1586, elle a été redécouverte en 1904.
De chaque côté du chœur se trouvent deux autels à retables de la fin du 15e siècle.
Enfin, observez le buste de Jeanne d’Arc « Le dernier soupir« . Cette sculpture de maxime Real Del Sarte (1929), a été réalisée en marbre de carrare, bronze et onyx. Saviez-vous que son socle renferme de la terre sur laquelle fut édifié le bûcher de Rouen ?
La maison natale de Jeanne d’Arc
C’est assurément l’édifice le plus célèbre de Domrémy, grâce à sa façade connue dans toute la France depuis longtemps. Tiens, parlons-en justement de la façade !
Vous pensiez que, puisque c’est la maison de Jeanne d’Arc, elle lui est contemporaine. Pas exactement. La façade actuelle est le résultat de plusieurs remaniements effectués depuis la mort de la Pucelle par ses frères et leurs descendants.
La facade est ornée d’un tympan sculpté d’armoiries du 15e siècle et d’une statue de Jeanne en armure agenouillée.
A l’intérieur
Et vous pouvez visiter l’intérieur ! Vous y découvrirez quatre pièces :
- la pièce principale (chambre natale),
- la chambre de Jeanne et sa sœur (avec vue sur l’église),
- la chambre des frères et
- le cellier.
La maison et son domaine furent achetés en 1818 par le Département des Vosges et classés Monuments Historique en 1840.
De nos jours, la maisonnette accueille plus de 35 000 visiteurs par an. Un des premiers touristes de renom à l’avoir visitée est le philosophe Michel de Montaigne en 1580.
Pour en savoir plus sur la Maison natale de Jeanne d’Arc, rendez-vous sur le site Montjoye.net.
Le musée johannique
Le musée consacré à Jeanne d’Arc se trouve dans un bâtiment moderne situé derrière la maison et l’église. Le centre « Visages de Jeanne » présente de façon pédagogique la vie au temps de Jeanne d’Arc. Ce qui permet de mieux comprendre les enjeux de l’époque.
Le musée comprend trois espaces différents et complémentaires: le Déambulatoire, la Grande Galerie et la Salle de Projection. Vous y passerez une heure voire un peu plus si vous prenez le temps de tout lire et tout voir…
La campagne de Domrémy
Domrémy appartient à la vallée de la Meuse qui, entre Void-Vacon au nord et Neufchâteau au sud, a un certain cachet.
A propos des méandres de la Meuse à Domrémy, l’écrivain lorrain Maurice Barrès écrivait :
« Certains soirs à Domrémy, le ciel est chargé de vapeurs qui glissent avec un doux bruissement sur les prairies épaisses et les collines de la Meuse. Cette pluie tiède, un vent léger, le crépuscule, l’éclat plombé de la rivière dans ses méandres composent une grâce, un repos inexprimables. Les villages s’enfoncent dans la brume, le cœur se perd dans le ravissement, nul pays qui se taise davantage. C’est la vallée silencieuse.
A Domrémy, nous sommes enveloppés dans la vapeur du mystère où Jeanne se forma… Les diverses puissances religieuses éparses dans cette vallée…, à la fois celtique, latine et catholique, Jeanne les ramasse et les accorde, dût-elle en mourir« .
Quel charmant tableau, n’est-ce pas ?
Ce n’est pas surprenant que ce pays soit à l’origine de tant de mystères.
La Basilique du Bois Chenu
A 1500 mètres de Domrémy, sur la route de Neufchâteau (D164), une église se détache nettement du paysage : il s’agit de la basilique du Bois Chenu.
Elevé sur le flanc d’un coteau boisé et dominant la vallée de la Meuse, son clocher-porche s’élève à 65 mètres de hauteur.
L’emplacement de l’église n’est pas dû au hasard. La tradition veut qu’ici aussi, la Pucelle ait entendu ses voix alors qu’elle gardait les moutons.
Un monument national de la reconnaissance française à la Pucelle
En 1877, une souscription nationale fut lancée pour l’édification d’un monument national de la reconnaissance française à Jeanne d’Arc.
La première pierre fut posée le 3 novembre 1881 et les travaux étaient toujours en cours lorsque Jeanne d’Arc fut béatifiée par le pape Pie X. Puis en 1920, la Pucelle fut canonisée par le pape Benoît XV. Le sanctuaire fut finalement consacré en 1926, année de l’achèvement des travaux. En 1939, l’église reçut le titre de basilique mineure (13 églises portent cette distinction en Lorraine).
La basilique du Bois Chenu présente un style néo-roman. Les pierres de construction proviennent des carrières d’Euville, près de Commercy. La pierre d’Euville a notamment été utilisée pour édifier la place Stanislas à Nancy et, à Paris, l’opéra Garnier et la gare de l’Est.
Illuminée en soirée, la basilique appartient au diocèse de Saint-Dié.
Greux et la chapelle de Bermont
A un kilomètre au nord de Domrémy se trouve la petite commune rurale de Greux. En 1571, ce village-rue typique de la Lorraine resta français lorsque Domrémy fut rattachée au duché de Lorraine. Ce qui n’empêcha pas le village de subir les raids des Suédois pendant la guerre de Trente Ans. Ceux-ci détruisirent le village et son église… mais épargnèrent la chapelle de Bermont.
Promenons-nous dans les bois…
Il faut s’enfoncer dans les bois au nord du village pour découvrir une chapelle, à quelques pas du département voisin de la Meuse. Au milieu de nulle part se dresse les bâtiments de la chapelle de Bermont qui, à première vue, ne semblent présenter aucun intérêt.
Il y a fort longtemps, au Moyen Age, ce sanctuaire faisait partie d’un ermitage, rattaché à un hospice. Les ermites dépendaient de l’ordre des chanoines réguliers de Prémontré (pour faire plus court : les Prémontrés). Ils avaient fait vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance à leur évêque ou à leur supérieur.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
Alors que les parents de Jeanne d’Arc la croyaient à la charrue ou aux champs, c’est ici que venait prier Jeanne d’Arc pendant sa jeunesse. Elle s’y rendait tous les samedis en pèlerinage, « pour prier et y porter des cierges ». C’est aussi dans les bois alentours que Jeanne d’Arc entendit ses voix lui ordonner :
« Jeaaaanne, au secours ! »
Euh non, je me suis trompé de voix. Ca, c’était celle d’un certain Jean-Marie [Ooups !]. Il s’agissait plutôt des voix de Sainte Catherine et Sainte Marguerite :
« Jeaaaanne, il faut bouter les Anglais hors de France ! »
Voilà, ça c’est dit.
Une chapelle française !
En tout cas, vue de l’extérieur, cette humble chapelle du 12e siècle ne paye pas de mine. Mais curieusement, elle était pour Jeanne d’Arc le seul sanctuaire dédié à la Vierge situé en territoire français. Pour une jeune fille priant pour la France, ça devait avoir un sens profond.
Toutefois, l’histoire de la chapelle de Bermont ne s’arrête pas là. En 1619, les héritiers des Bourlémont, maîtres des lieux, cèdent leur droit de patronage aux oratoriens de Nancy. Et, plus proche de nous, une autre Jeanne d’Arc visita la chapelle le 10 septembre 1948 en la personne d’Ingrid Bergman. L’actrice suédoise s’y rendit justement à la fin du tournage du film Jeanne d’Arc.
Petit détour par Neufchâteau
Située à une dizaine de kilomètres de Domrémy, voici la petite ville de Neufchâteau. Cette sous-préfecture du département des Vosges est classée parmi « Les Plus Beaux Détours de France » et est labellisée « Ville et Métiers d’Arts », un réseau regroupant plus de 70 collectivités françaises. Elle fait également partie de l’Association des Villes Johanniques. Pourquoi ?
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
Premièrement, parce que c’est à Neufchâteau que Jeanne fit sa communion.
Ensuite, la famille de Jeanne s’y réfugia vers août/octobre 1428 pour se protéger des troupes du maréchal de France Antoine de Vergy (un Bourguignon) qui mirent la contrée de Vaucouleurs à feu et à sang. Les habitants de Domrémy (dont la famille d’Arc) s’enfuirent à Neufchâteau, ‘avec troupeaux, armes et bagages’… La famille fut hébergée dans une auberge tenue par une gente dame répondant au nom de La Rousse.
Ce qu’il faut voir à Neufchâteau
Si vous êtes de passage à Neufchâteau, visitez le cœur historique de la ville. Ce fut la première commune du département à recevoir le label Patrimoine Remarquable. En effet, la vieille-ville correspond à un secteur sauvegardé de 58 hectares. Ce centre historique présente un patrimoine d’exception avec ses hôtels particuliers et maisons bourgeoises des 16e, 17e et 18e siècles. On y trouve des édifices en pierre de taille de la Renaissance et de la période néo-classique.
Au cœur de la vieille-ville, Jeanne d’Arc a sa statue sur la place Jeanne d’Arc, anciennement place du Marché et Place Royale.
Et puis, ne cherchez pas de château, il n’y en a plus depuis longtemps.
Neufchâteau compte deux églises historiques :
Eglise Saint-Nicolas
C’est l’église haute de Neufchâteau, dominant la ville. De style roman et gothique, elle fut édifiée à partir du 12e siècle. A l’intérieur, remarquez la belle mise au tombeau de style gothique tardif du 15e siècle.
Eglise Saint-Christophe
L’église date des 13e et 14e siècles. Dans la chapelle funéraire se trouve une petite merveille, unique en France : une voûte à douze clés pendantes. Il s’agit d’une véritable dentelle de pierre.
Pour la petite anecdote, sachez que, pendant la Première guerre mondiale, un jeune américain de 16 ans fut brancardier de la Croix-Rouge à Neufchâteau.
Son nom ?
Walt Disney !
Les alentours de Neufchâteau
Neufchâteau est un centre touristique et commercial pour toute une contrée située à l’extrémité ouest du département des Vosges, aux confins de la Champagne et de la Bourgogne.
Le château de Bourlémont
Sur la route qui vient de Domrémy, vous apercevrez le château de Bourlémont. Cette forteresse médiévale fut édifiée sur un promontoire isolé au-dessus de la vallée de la Meuse.
La vallée de la Meuse « … s’étend toute unie… entre des collines arrondies… Après avoir laissé à sa gauche le plateau boisé du haut duquel le château de Bourlémont domine le Val de la Saônelle, et à sa droite Coussey et sa vieille église, la rivière flexible passe entre le Bois chenu au couchant et la côte de Julien au levant… » (Anatole France).
Avec ses tours rondes en poivrières et son corps de logis du 16e siècle, Bourlémont fait partie des plus beaux châteaux de Lorraine. Mais ce domaine privé ne se visite pas.
Les seigneurs de Bourlémont étaient seigneurs de Domrémy. On en a une belle vue depuis Coussey.
Vu que nous sommes à Coussey, profitons-en pour mentionner l’église de ce village. Elle fut construite à partir du 12e siècle. Alors que l’extérieur est de style roman, l’intérieur fut aménagé selon le style gothique.
Le portail roman de Pompierre
A 10 km au sud de Neufchâteau, le village de Pompierre est réputé pour le portail roman de son église.
Datant du 12e siècle, il a été admirablement conservé. Les voussures joliment travaillées encadrent un tympan sculpté à trois registres (une bonne manière de tester votre connaissance des Evangiles !) :
- le massacre des Innocents et la Fuite en Egypte,
- l’Annonce aux bergers et l’Adoration des Mages,
- l’Entrée de Jésus à Jérusalem.
Enfin, la décoration très fouillée des chapiteaux et des colonnettes complète l’ensemble.
L’église romane de Soulosse-sous-Saint-Élophe
A 7 km du centre de Neufchâteau, sur la route de Toul, se dresse l’église romane Saint-Elophe. De styles roman et gothique, elle fut construite aux 13e et 15e siècles.
Elle abrite les reliques de saint Elophe, qui aurait subi le martyre en l’an 362. La légende raconte que le saint décapité aurait gravi la colline de l’église, la tête sous le bras. Une histoire sans tête qui ressemble fort à celle de Saint-Denis à Montmartre !
Du cimetière derrière l’église, on a une belle vue sur la vallée de la Meuse, le château de Bourlémont et la basilique du Bois-Chenu.
A l’époque des Romains, le site de la commune était traversé par la voie romaine de Lyon à Trèves. On y a naturellement retrouvé plusieurs objets d’époque qui sont exposés dans le petit musée archéologique gallo-romain, au rez-de-chaussée de la mairie.
Les vestiges romains de Grand
Restons avec les Romains et partons à Grand, à une vingtaine de kilomètres de Neufchâteau.
Cette commune se situe au point le plus à l’ouest du département des Vosges (à une position géologique qui n’a rien de commun avec le massif montagneux).
Dans le petit village de Grand (360 habitants), on voit l’Histoire en grand ! C’est même grandiose. Je m’explique.
A l’époque romaine, il s’agissait d’une ville importante de 20 000 habitants : Andesina. On le sait car des kilomètres d’égouts romains ont été découverts sous le village.
La localité possédait un amphithéâtre pouvant contenir 17 000 spectateurs, soit presque la population toute entière de la ville. Une taille similaire aux arènes de Lutèce (5e arrondissement de Paris). Il faisait partie des 10 amphithéâtres les plus vastes du monde romain avec un grand axe d’une longueur de 134 m. Puis il a servi pendant des siècles de carrière. Restauré en 1963, celui-ci présente encore deux belles arcades.
En 1883, on a mis au jour une superbe mosaïque du Ier siècle après J.-C. D’une surface de 224 m2 d’un seul tenant, il s’agit d’une des plus grandes de ce genre – et en tout cas la plus vaste qui ait été dégagée à ce jour en France. Elle constituait le pavement d’une partie de l’immense basilique.
A proximité s’élevait le temple voué au culte d’Apollon Grannus dont le site serait aujourd’hui occupé par l’église.
C’est donc cette divinité – « Grannus » – qui donna, au fil des siècles, son nom au village « Grand ».
Si vous êtes intéressé par l’époque gallo-romaine, rendez-vous à Liffol-le-Grand, dernier village lorrain avant l’entrée en Haute-Marne. On y trouve un petit musée archéologique qui rassemble une collection d’objets préhistoriques, gallo-romains et médiévaux provenant des recherches et des fouilles d’une équipe de bénévoles.
En route pour Vaucouleurs
Prenons à présent la direction du nord, en suivant le cours pittoresque de la Meuse.
« La Meuse coule libre et pure entre les trochées de saules et d’aulnes et les peupliers qu’elle arrose, se joue tantôt en brusques détours, tantôt en longs circuits, divise et réunit sans cesse les glauques filets de ses eaux » (Anatole France).
Une fois passé par Domrémy, nous empruntons la D964 et traversons Goussaincourt puis Burey-la-Côte. A un kilomètre environ après ce village, prenons à droite la D32 jusqu’à Pagny-la-Blanche-Côte puis suivons la D145 jusqu’à Vaucouleurs.
Vous passerez devant trois églises intéressantes :
L’église Saint-Brice de Champougny et son clocher fortifié,
L’église fortifiée Saint-Evre de Sepvigny.
A la sortie de ce dernier village, voyez sur la gauche la chapelle du Vieux-Astre.
Cette dernière est en fait le chœur d’une ancienne église romane (fin 12e siècle). A l’intérieur, des fresques du 15e siècle sont encore visibles, notamment « Le Dit des trois morts et des trois vifs » (en savoir plus).
Vaucouleurs et le destin de Jeanne d’Arc
Vaucouleurs – le Val des Couleurs – est une ville johannique d’environ 2000 âmes joliment située, sur les coteaux de la Meuse. C’est le point de départ de l’épopée chevaleresque de Jeanne d’Arc.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
A l’époque de Jeanne d’Arc, le maître des lieux est Robert de Baudricourt. En 1415, il fut nommé gouverneur de la garnison du roi de France dans la châtellenie de Vaucouleurs dont dépendait Domrémy.
Le 13 mai 1428 (ou était-ce en 1429 ?), il reçu la visite d’une jeune paysanne de 16 ans venue de Domrémy.
Elle se dit l’envoyée de Dieu et, comble de l’audace, réclama une escorte pour se rendre auprès du roi Charles VII à Chinon. Ni plus, ni moins !
« Je suis venue pour parler à Robert de Baudricourt pour qu’il veuille me conduire ou faire conduire au roi« .
Au début, le sire de Baudricourt envoya paître cette illuminée…
Il faut dire que la jeune fille était venue rencontrer le gouverneur sans autorisation parentale ! Il fit donc ramener Jeanne chez ses parents avec pour conseil de lui administrer une bonne paire de claques.
Mais Jeanne fut tenace dans sa demande. Et revint à Vaucouleurs pour réitérer sa demande.
Sa ténacité suscita un vaste élan populaire. A tel point que Baudricourt se laissa convaincre et lança le célèbre :
« Va… va et advienne que pourra« .
Mais après avoir au préalable fait exorciser la Pucelle par le curé du lieu. Simple précaution !
Connaissez-vous Jeanne Bécu ?
Une autre Jeanne célèbre est née à Vaucouleurs le 19 août 1743 : Jeanne Bécu.
Son nom ne vous dit rien ?
Alors si je vous dis qu’elle était devenue comtesse par mariage, vous la reconnaitrez : il s’agit de Madame du Barry !
Elle fut la dernière favorite du roi Louis XV et connut le sort tragique de la guillotine sur la place de la Concorde à Paris, le 8 décembre 1793.
Décidément, autrefois, c’était pas top de porter le prénom de Jeanne à Vaucouleurs !
Ce qu’il faut voir à Vaucouleurs
Revenons en 2020. Le parking le plus proche du centre se situe sur la place du Moulin. Il est bordé d’un petit canal pittoresque.
La rue des Moulins et la rue Vieille conduisent à l’hôtel de ville.
L’Hôtel de Ville et le musée Jehanne d’Arc
Le bâtiment de 1848 est inspiré de la Renaissance italienne. L’aile droite abrite un musée consacré à l’histoire locale et à l’épopée de la Pucelle. Avec 300 dessins, maquettes, objects publicitaires, cartons de vitraux exposés dans quatre salles.
Sur la place Achille-François (devant la mairie), remarquez la statue équestre de Jeanne d’arc brandissant une épée de sa main droite. Pour l’anecdote, elle a été réalisée en bronze par Georges Halbout du Tanney en 1951 pour la ville d’Alger. A l’issue de la guerre d’Algérie, on se doute bien qu’elle n’a pas pu rester sur place ! Elle fut donc ramenée en France, restaurée puis placée le 8 mai 1966 à Vaucouleurs, pour le bicentenaire du rattachement du duché de Lorraine à la France.
L’église Saint-Laurent
L’église paroissiale de Vaucouleurs est une église-halle de 1785. Elle s’aperçoit de loin avec son clocher carré surmonté d’une toiture à clocheton.
A l’intérieur, il faut lever les yeux au plafond pour admirer les fresques de 1860.
Les peintures couvrent l’intégralité des trois travées de la nef voûtée en arêtes. Les médaillons représentent les onze apôtres.
Malheureusement nous avons trouvé ces fresques en bien mauvais état… Espérons qu’un jour prochain, les peintures seront restaurées.
Remarquez également la belle chaire datant de 1717.
Dans la première travée du chœur, des vitraux de 1892 retracent les épisodes de la vie de la Pucelle (son départ de Vaucouleurs par la Porte de France, sa mort au bûcher de Rouen).
D’autres vitraux intéressants furent apposés en 1921 dans les fenêtres des bas-côtés. Ils mettent en scène des Poilus de la Première guerre mondiale. On les voit dans les bras de la Victoire ou en prière devant une statue de la Vierge.
Art Nouveau à Vaucouleurs
Pendant que nous sommes sur la rue principale, observez au 41 rue Jeanne d’Arc le bâtiment de l’ancienne Caisse d’Epargne de Vaucouleurs.
Edifié en 1909 par l’architecte Gaston Périn de Saint-Mihiel, il s’agit d’un bel exemple Art Nouveau, façon Ecole de Nancy.
Le site castral
Une visite à Vaucouleurs ne serait pas complète sans se rendre au site castral. Pour cela, il faut faire une petite grimpette par des escaliers escarpés. Une fois arrivé en haut, on reprend son souffle et on admire la vue panoramique sur les toits de Vaucouleurs et la vallée de la Meuse.
Le site castral comprend trois édifices intéressants.
La porte de France
C’est celle par laquelle Jeanne quitta Vaucouleurs pour Chinon, le 23 février 1429, escortée de ses six premiers compagnons d’armes.
Bon, il faut reconnaitre qu’il ne s’agit plus que d’un reste de la porte primitive.
Du château de Vaucouleurs, il ne reste plus grand chose car la végétation a pris le dessus depuis longtemps. A peine peut-on découvrir quelques pans de mur.
La chapelle castrale
L’actuel sanctuaire a été édifié entre 1923 et 1929 sur les fondations de l’ancienne chapelle du château dont elle a gardé la crypte primitive du 13e siècle. L’édifice néo-gothique se compose aujourd’hui de trois chapelles.
La chapelle centrale montre quatre ogives qui retombent sur un seul pilier. On peut y admirer de beaux vitraux. Celui du milieu représente Jeanne en paysanne écoutant les voix.
Quant aux deux chapelles latérales, elles abritent les débris lapidaires provenant de l’ancienne Collégiale Sainte-Marie.
La crypte se compose de trois salles sous ogives.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
La crypte abrite la statue de Notre-Dame-des-Voûtes (Vierge assise du 13e siècle), devant laquelle priait Jeanne.
Cette crypte est le témoin des angoisses de la Pucelle, quand l’héroïne attendait la décision de Robert de Baudricourt.
On raconte que Jean le Fumeux, alors enfant de chœur, dit l’avoir vue sous ces voûtes, « agenouillée devant la Vierge, tantôt le visage prosterné, tantôt le regard levé vers le ciel« .
Le tilleul remarquable
Sur la pelouse du château s’élève un imposant tilleul, classé « arbre remarquable ». Le tronc principal serait une branche maîtresse de l’arbre qu’aurait connu Jeanne d’Arc.
On raconte que son cheval en aurait brouté les feuilles tendres, provoquant le verdissement de toute la nature alentour… en plein mois de février. Le dérèglement climatique semble ne pas dater d’hier !
Les Tours Pagis
On pourrait croire qu’il s’agit des ruines du château de Vaucouleurs. Il n’en est rien.
Vers 1890-1900, l’évêque de Verdun Pagis décide d’élever une basilique à la gloire de la Pucelle.
Il faut dire que Domrémy édifiait la sienne au Bois-Chenu…
Mais l’évêque avait vu trop grand. Ce monument était trop imposant et trop coûteux. Il ne fut pas achevé et on en resta là. De curieuses ruines en effet…
N’oubliez pas vos jeannettes !
Avant de quitter les lieux, n’oubliez pas de déguster les fameuses jeannettes de Vaucouleurs.
Il s’agit d’une spécialité à base de chocolat, de noisettes et de caramel au miel confectionnée par la boulangerie Tommasi, sise 56 rue Jeanne d’Arc.
Des habitants hauts en couleurs !
Enfin, savez-vous comment on appelle les habitants de Vaucouleurs ?
Les Valcolorois et Valcoloroises !
Car souvenez-vous, Vaucouleurs, c’est le Val des Couleurs.
En route pour Toul
Quittons Vaucouleurs par la D964 en direction de Commercy. Après 2-3 km de route, un panneau routier indique sur la droite la direction du château de Gombervaux.
Vous découvrirez les ruines d’une maison-forte du 14e siècle reconnaissable à sa belle porte-donjon à créneaux… un joli site à découvrir au cœur de la campagne lorraine. Des visites guidées y sont organisées en été. Pour en savoir plus sur Gombervaux.
Un circuit balisé de 12,5 km au départ et à l’arrivée de Vaucouleurs vous amènera au château de Gombervaux (télécharger la carte de randonnée)
Revenez sur Vaucouleurs pour prendre la D960 en direction de Toul. Après avoir franchi la forêt, vous arriverez sur le village viticole de Blénod-lès-Toul. La photo suivante a été prise le long de la D113.
Toul – des fiançailles qui se terminent en procès
C’est l’histoire méconnue de Jeanne d’Arc en Lorraine… lorsqu’elle vint à Toul pour une raison plutôt surprenante.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
Avant de partir pour Vaucouleurs, il semblerait que Jeanne d’Arc ait eu une sorte de fiancé. On ne sait pas grand-chose de l’affaire, mais le garçon, visiblement contrarié, poursuivit Jeanne d’Arc devant le tribunal ecclésiastique de Toul dont relevait Domrémy. Objet du contentieux : rupture abusive de fiançailles !
Lors du jugement de Jeanne d’Arc à Rouen, on l’interrogea sur cette mystérieuse affaire matrimoniale, ce à quoi elle répondit :
« Je ne l’ai pas fait citer ; ce fut lui qui me fit citer«
Elle plaida le fait qu’elle ne lui avait jamais fait de promesse. Puis elle ajouta que, si elle avait pour habitude d’obéir à ses parents, cela n’avait manifestement pas été le cas ici.
Une plaque de souvenir apposée à Toul relate cet épisode méconnu de la Pucelle :
« En l’an de grâce 1428 Jeanne d’Arc, diocésaine de Toul, comparut ici devant l’officialité de l’évêque Henri de Ville, présidée par Frédéric de Maldemaire, doyen de Saint Gengoult dans un procès matrimonial que lui fit un jeune homme de Domremy. Ses juges l’ayant déclarée libre de tout lien, Jeanne d’Arc put entreprendre sa merveilleuse chevauchée et sauver la France« .
Et savez-vous où eut lieu le procès ? A l’Officialité de Toul, c’est-à-dire à l’emplacement de l’actuel Office de Tourisme, juste en face de la cathédrale Saint-Etienne.
Ce qu’il faut voir à Toul
Lors d’une halte à Toul, ne manquez pas de visiter la cathédrale Saint-Etienne, de style gothique.
Et son cloître, un des plus vastes de France.
L’église Saint-Gengoult est également flanquée d’un magnifique cloître gothique tardif.
Enfin, les remparts Vauban de Toul font le tour de la ville.
Le destin français de Jeanne d’Arc
On connait la suite de l’histoire. L’entrevue royale de Chinon, l’examen à Poitiers, la libération d’Orléans, le sacre à Reims, la capture à Compiègne…
Et l’emprisonnement de la Pucelle à Rouen précédant sa mort tragique sur le bûcher.
En bonne compagnie de Pierre Cauchon de Beauvais et de l’évêque-cardinal de Winchester (pour cette partie de l’histoire, je vous renvoie à mon autre article ici !)
C’était le 30 mai 1431 sur la place du Vieux-Marché.
J’ai visité cet endroit où une stèle marque l’emplacement du bûcher.
L’église Sainte-Jeanne d’Arc, de facture contemporaine, abrite de magnifiques vitraux provenant d’une église détruite lors des bombardements de la Seconde guerre mondiale.
Ce pan de l’Histoire de France s’arrête là.
Ou du moins, c’est ce que l’on croit…
Car une visite particulière de Jeanne a laissé certains historiens songeurs.
Appuyons sur « Pause » et rembobinons l’Histoire jusqu’à l’an de grâce 1428.
Accrochez-vous car ce qui va suivre peut remettre en cause ce pan de l’Histoire de France que nous avons appris à l’école…
Quand Jeanne d’Arc se rendit à Nancy
Terminons notre voyage dans la Lorraine de Jeanne d’Arc par Nancy.
Comment Jeanne, native de Domrémy, s’est retrouvée dans la capitale des ducs de Lorraine, à Nancy ? Car, si la commune de Domrémy-la-Pucelle est aujourd’hui incluse dans la région Lorraine, souvenons-nous que ce n’était pas le cas au 15e siècle. Le village de notre Jeannette nationale appartenait au Barrois mouvant, relevant du roi de France. Il existait une frontière pour entrer dans le duché de Lorraine et il fallait s’être procuré un sauf-conduit, sorte de visa de l’époque.
Et pourtant, l’Histoire a consigné une visite de Jeanne d’Arc à Nancy pendant l’hiver 1428.
Mais pourquoi diantre est-elle allée à Nancy ?
C’est le duc de Lorraine Charles II, vieux et malade, qui fit appel à elle.
Retour en arrière… à l’époque de Jehanne
Au début de l’année 1429, alors qu’elle s’apprêtait à partir pour Chinon depuis Vaucouleurs, le duc de Lorraine Charles II la demanda.
Munie d’un sauf-conduit (car elle n’était pas sujette du duché de Lorraine), elle ne se dirigea pas tout de suite à Nancy. Elle souhaita faire ses dévotions au grand Saint-Nicolas (Patron des voyageurs) dont les reliques étaient gardées dans une chapelle de la ville de Port (aujourd’hui Saint-Nicolas-de-Port). A cette époque, la magnifique basilique que l’on connait n’avait pas encore été construite. Elle le sera à partir de 1481 suite à la Bataille de Nancy (1477).
Or, le vieux duc de Lorraine, avait une maîtresse : Alison du May, la fille naturelle d’un clerc, chantre de la collégiale saint-Georges et d’une marchande de légumes.
« Le duc de Lorraine, vieux et malade, vivait en son hôtel avec sa belle amie Alison du Mai, bâtarde, fille de prêtre, qui en avait chassé l’épouse légitime, madame Marguerite de Bavière. Madame Marguerite était de haute naissance et pieuse, mais vieille et laide; et madame Alison était jolie; le duc Charles lui avait fait plusieurs enfants. » (Anatole France dans Vie de Jeanne d’Arc).
Jeanne à la rescousse pour une histoire de bonnes femmes
Mais c’est pas tout ! Lisez la suite :
« Il y avait à Nancy des personnes de bien qui désiraient que le duc Charles reprît sa bonne femme et comptaient, pour l’y amener, sur les exhortations d’une dévote, ayant révélations du Ciel… Ces personnes annoncèrent au vieux duc égrotant la fille de Domrémy comme une sainte guérisseuse » (Anatole France dans Vie de Jeanne d’Arc).
Voyez-vous, c’était Plus Belle La Vie avant l’heure !
On se doute bien de ce qui va suivre au feuilleton…
Duc, reprenez vot’ bonne femme !
« Dès qu’il [le duc] la vit, il lui demanda si elle ne pouvait pas le rétablir en bonne forme et santé.
Elle répondit que « de cette manière » elle ne savait rien.
Cependant elle l’avertit qu’il se gouvernait mal, et lui annonça qu’il ne guérirait oncques s’il ne s’amendait. Et elle lui enjoignit d’avoir à envoyer Alison sa concubine et à reprendre sa bonne femme.
Sur ce chapitre, on lui avait un peu fait la leçon, sans doute, mais elle ne disait que ce qu’elle pensait, car elle avait les mauvaises femmes en aversion.
Elle était venue vers le duc parce que son état le voulait, parce qu’une petite sainte ne se refuse pas aux consultations d’un haut seigneur et parce qu’enfin on l’y avait emmenée.
Mais sa pensée était ailleurs; elle ne songeait qu’à délivrer le royaume de France » (Anatole France dans Vie de Jeanne d’Arc).
Le Duc de Lorraine devant un choix cornélien
Le duc malade ne suivit pas les conseils de Jehanne et ne souhaitait pas se rabibocher avec sa bonne femme, vieille et laide de surcroît. Et il garda la plus jeune et la plus jolie.
Pour se donner bonne conscience ou pour s’en débarrasser, il offrit à Jeanne quatre soldats et un cheval noir. Tout compte fait, Jeanne aura au moins gagné cette petite récompense pour ce détour par Nancy. Plus on est de copains, plus sûre est la route qui mène à Chinon.
Un sacré coco, ce Charles II…
Pensez donc, notre héroïne qui s’apprêtait à libérer le royaume de France en était temporairement empêchée à Nancy pour régler une histoire de bonnes femmes !
Mais le duc ne survécut pas longtemps à sa maladie. Il mourut exactement deux ans plus tard, le 25 janvier 1431. Au même moment, Jeanne était emprisonnée à Rouen en attente de son jugement.
L’autre version de l’affaire : la thèse complotiste
Plusieurs sources doutent de cette version officielle pour plusieurs raisons.
Comment cette paysanne a-t-elle pu se présenter devant le duc, avant même d’avoir commencé son extraordinaire chevauchée de Vaucouleurs à Chinon ?
Etait-elle donc reconnue pour ses qualités de guérisseuse ?
Comment pouvait-elle être reçue à Nancy, cette terre étrangère à 60 km de son pays natal ?
Ainsi vont les intrigues mystérieuses de Jeanne d’Arc.
Etait-ce vraiment elle qui mourut sur le bûcher en 1431 à Rouen ? Etait-elle la fille cachée de la reine de France Isabeau de Bavière et de Louis d’Orléans son amant ?
Ainsi, comment a-t-elle appris à monter à cheval pour guerroyer en si peu de temps ?
Comment a-t-elle su manier l’épée et les armes de guerre ?
Comment une jeune femme illettrée et parlant le patois a-t-elle pu s’exprimer en bon français du jour au lendemain ?
Et comment une bergère a-t-elle pu apprendre si rapidement les usages compliqués de la cour du dauphin Charles VII ?
Tant de questions pour lesquelles historiens et journalistes ont cherché à percer le mystère.
Vous aussi êtes dubitatifs devant ces fake-news ? Je vous comprends… d’ailleurs, souvenez-vous que cet article a été publié un 1er avril. Poisson ou pas, c’est à vous de décider !
Séjournez en Lorraine !
Si vous planifiez de séjourner dans la région de Nancy-Metz, je vous invite à prendre connaissance de mon article « Où dormir en Lorraine ?
Jeanne d’Arc en Lorraine : pour en savoir plus
- Retrouvez tous mes articles de blog sur la Lorraine !
- Comment j’ai retrouvé Jeanne d’Arc en Angleterre sur mon autre blog Destination Angleterre
- Le site de l’association des Villes Johanniques dont font partie Domrémy, Neufchâteau et Vaucouleurs
- Le site de Lorraine Tourisme
- L’office de tourisme de l’Ouest des Vosges (Neufchâteau, Grand, Domrémy)
- L’office de tourisme du canton de Vaucouleurs
- Le Pré de Nancy, l’office de tourisme du pays de Toul et du sud de la Meurthe-et-Moselle
- Le site de Nancy Tourisme
- Où dormir en Lorraine ? Découvrez mon article dédié avec une liste d’établissements hôteliers que j’ai testés dans la région.
Un peu de lecture sur Jeanne d’Arc en Lorraine ? Voici une sélection d’ouvrages, ainsi que le fameux film de Luc Besson :
Souvenez-vous de Jeanne d’Arc en Lorraine en épinglant sur Pinterest
Pour ce rendez-vous de l’événement #EnFranceAussi, le thème choisi par Paule-Elise du blog 1916kilometres est « Un portrait, une rencontre ». Ce RV interblogueurs, initié par Sylvie du blog Le coin des Voyageurs, a pour objet de (re)-découvrir les beautés de la France.
Découvrez les articles de ma participation à l’événement interblogueurs #EnFranceAussi. Cliquez sur le lien ici pour les lire !
Suivre ses traces est en effet une bonne façon de découvrir la région! En touraine aussi de Loches à Chinon en passant par Tours , de nombreux lieux revendiquent son passage!
Oui, tout à fait, d’ailleurs ça permet de créer des « ponts » avec les autres régions de France qu’a traversées Jeanne d’Arc, dont la Touraine !! 🙂
Une belle découverte du pays natal de Jeanne d’Arc en Lorraine, une figure emblématique de l’histoire de France. J’avais déjà visité, il y a quelques années, sa maison natale qui m’avait émue. Magnifique la mosaïque et l’amphithéâtre de Grand ! Bonne journée Pierre !
Merci Martine ! Malgré la petite maison de Jehanne, c’est une partie de la Lorraine assez méconnue que j’ai apprécié mettre en avant. Ainsi, Grand joue dans la cour des grands… comme avec certains sites de Provence 😉
Un récit très complet ! On ne s’imagine pas comme ça toutes les ramifications et les lieux concernés ! 🙂
Merci Anne ! Oui, c’est une histoire qui en fin de compte est très compliquée (même pour sa partie 100 % lorraine). Même en restant à l’essentiel, on découvre d’intéressantes anecdotes 🙂
S’ il vous arrive de revenir à Domrémy, demandez à visiter la chapelle Notre Dame de Bermont . Vous y verrez deux portraits supposés de Jehanne découverts il y a seulement quelques années. Seuls portraits datant de son époque et qui la représenteraient . J’ai eu la chance de les admirer avec une émotion infinie (je suis d’une famille valcoloroise depuis plusieurs générations ).
Merci pour vos récits complets qui nous font partager votre passion . Et merci d’avoir mis « nos » Jehanne à l’honneur (Mme du Barry est née rue …. de la pouille »….).
Un grand merci Dominique pour ces précieux conseils ! Ravi d’avoir mis à l’honneur ce beau pays de Vaucouleurs ! A bientôt !
Quel bel itinéraire bien complet sur les traces de Jeanne d’Arc ! C’est certain qu’il reste encore bien des mystères autour de cette figure historique, qui reste pour le moins fascinante. J’avais bien aimé visiter la maison de Domrémy lors d’un roadtrip en Lorraine il y a quelques années. Merci pour ta participation !
Avec plaisir Paule-Elise ! Merci pour ce thème… manifestement à point nommé vu les circonstances actuelles ! Bon courage et à bientôt ! ?
Ah quelle histoire ! J’aime bien les fake news d’histoire, je trouve cela passionnant de voir comme une femme aussi célèbre que Jeanne d’Arc a encore autant de mystère… Entre histoire et mythe, c’est sympa ! Cela me fait penser quand j’explique les Avengers à mes enfants… 😀 Qu’est ce qui est BD ou mythologie nordique…
Merci Virginie ! Eh ben moi j’ai été le premier étonné en recherchant autour de ce personnage… je n’avais pas soupçonné tout le mystère et les interrogations quant à son origine et même sa mort ! On en a encore pour des siècles de fake news ?
J’aime beaucoup l’irruption tout à fait inattendue de Walt Disney dans ton article sur Jeanne d’Arc 🙂 Et les retours à l’époque de Jeanne sont très intéressants
Merci Aurélie, oui ça m’a amusé beaucoup d’apprendre que le grand Walt Disney avait parcouru la terre natale de Jeanne d’Arc dans sa jeunesse ! 🙂
Quel sublime récit. Oh cette maison est si émouvante. Et puis Disney..
Merci Pierre. Que plaisir de lire tes articles.
Merci Sabrina ! Ravi de t’avoir fait découvrir la maison de la Pucelle (émouvante mais très très petite !), ainsi que les environs ! A bientôt 🙂
Quel article impressionnant ! merci de la balade !
Avec plaisir ! 🙂
Pfiou ! Encore un sacré article, instructif et riche de plein d’anecdotes ! J’ignorais que les Suédois étaient venus jusqu’en Lorraine ! Bref, un grand merci pour cette bouffée d’histoire de France.
Merci Delphine ! Eh oui, les Suédois (alliés de la France) sont venus en Lorraine et en Alsace où ils ont semé la terreur. A cette époque, l’Alsace et la Lorraine faisaient partie du Saint-Empire romain germanique, d’où les combats pour affaiblir les Pays allemands…
Jeanne d’Arc, un personnage historique et un mythe en meme temps. On commence maintenant a abandonner la figure de la bergere inculte qui entend des voix en gardant ses moutons. Il y a eu dans l’histoire de cette jeune fille des personnages qui avaient certainement un agenda: Yolande d’Aragon par exemple. Et l’episode de Jeanne qui reconnait le roi sans l’avoir ajmais vu (en est-on si sure?) auparavant et habille comme un de ses courtisans m’a toujoursparu ahautement suspect. Je sais que ces aspects de l’histoire herissent les « jeannophiles », mais comme le deces de Louis XVII au Temple ou l’enigne de la depouille de Napoleon aux Invalides, il faudra bien un jour qu’on aille y voir de plus pres. Meme question egalement sur la mort de Jeanne au bucher de Rouen: la condamnee emmenee avec une mitre de papier souffre enfilee sur la tete, etait-elle parfaitement identifiable?
Tout à fait Henri ! Depuis plusieurs décennies émerge un nouveau consensus sur l’issue du procès de Jeanne d’Arc et le fait qu’elle ait pu échapper au bûcher. Ce sont des pistes de réflexion et de recherches tout à fait passionnantes. Toutefois, je n’ai pas souhaité les entreprendre vu que cet article traite des origines de la Pucelle… mais il y a matière à écrire quelque chose de captivant en effet 🙂
Bonsoir
Magnifique parcours, superbe histoire de France qui retrace le parcours militaire t les évènement durant le périple de Jeanne d’Arc.
Il serait intéressant de refaire ce parcours pour suivre ce que tu nous indiques, les points de repère ne manquent pas !
Merci pour ce récit, et un complet d’histoire de France qui a couvert un espace de temps bien sombre.
Avec plaisir ! C’est en effet un petit pays qui ne manque pas d’intérêt touristique et historique ! 🙂
Bonjour Pierre,
J’ai bien apprécié votre reportage parfaitement documenté et illustré sur Jeanne d’Arc, cela m’a intéressé d’autant plus que j’habite la rue jeanne d’Arc dans ma localité. J’ai de ce fait visité quasiment tous les sites faisant références à Jeanne d’Arc. J’ai lu beaucoup et il me reste cependant des points d’interrogation quant à certains épisodes de sa vie, je pense honnêtement qu’on a souvent écrit l’Histoire aussi bien de la France que d’autres pays pas toujours dans le respect de la véracité historique, mais cela est un autre débat presque éternel.
Encore merci pour votre peine à nous concocter tous les dimanches un beau reportage.
Merci beaucoup Georges. L’histoire de Jeanne d’Arc est en effet sujette à de nombreux mystères qui ont pu être « manipulés » à des fins politiques au 19e siècle…. mais comme vous le dites justement, c’est un autre débat ! Bonne semaine !
Cher Pierre,
merci. merci. merci de tout coeur pour cet article si bien recherché. Je me permets d’ajouter ce poème que tous les petits Lorrains (et moi aussi) apprenaient autrefois au cours moyen.
Adieu à la Meuse | Poème de Charles Péguy
Adieu, Meuse endormeuse et douce à mon enfance,
Qui demeures aux prés, où tu coules tout bas.
Meuse, adieu: j’ai déjà commencé ma partance
En des pays nouveaux où tu ne coules pas.
Voici que je m’en vais en des pays nouveaux:
Je ferai la bataille et passerai les fleuves;
Je m’en vais m’essayer à de nouveaux travaux,
Je m’en vais commencer là-bas les tâches neuves.
Et pendant ce temps-là, Meuse ignorante et douce,
Tu couleras toujours, passante accoutumée,
Dans la vallée heureuse où l’herbe vive pousse,
Ô Meuse inépuisable et que j’avais aimée.
Tu couleras toujours dans l’heureuse vallée;
Où tu coulais hier, tu couleras demain.
Tu ne sauras jamais la bergère en allée,
Qui s’amusait, enfant, à creuser de sa main
Des canaux dans la terre, à jamais écroulés.
La bergère s’en va, délaissant les moutons,
Et la fileuse va, délaissant les fuseaux.
Voici que je m’en vais loin de tes bonnes eaux,
Voici que je m’en vais bien loin de nos maisons.
Meuse qui ne sais rien de la souffrance humaine,
Ô Meuse inaltérable et douce à toute enfance,
Ô toi qui ne sais pas l’émoi de la partance,
Toi qui passes toujours et qui ne pars jamais,
Ô toi qui ne sais rien de nos mensonges faux,
Ô Meuse inaltérable, ô Meuse que j’aimais,
Quand reviendrai-je ici filer encor la laine?
Quand verrai-je tes flots qui passent par chez nous?
Quand nous reverrons-nous? Et nous reverrons-nous?
Meuse que j’aime encore, ô ma Meuse que j’aime…
Extrait de Jeanne d’Arc (1897)
Avec plaisir, Huguette. Merci beaucoup pour le beau poème !
c’est vrai, moi-même, je ne crois pas à cette histoire de cette jeanne, mais cela fait du bien au tourisme local
Oui, ça permet de découvrir des lieux souvent méconnus mais plein d’intérêt !