La cathédrale de Spire vue du ciel © Kai Scherrer - licence [CC0] from Wikimedia Commons
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Pierre

DERNIÈRE MISE À JOUR : 24 juin 2022

Le Kaiserdom (cathédrale impériale) est le symbole de la ville de Spire. Selon le désir de son fondateur, l’empereur salien Conrad II, la cathédrale de Spire fut le plus vaste monument de son époque. En tant que témoignage de la piété des empereurs qui la firent édifier, elle est restée à nos jours un symbole médiéval éloquent de la Chrétienté.

Et pourtant, l’Histoire n’a pas toujours été tendre avec elle. Et les Français non plus ! En 1689, les troupes de Louis XIV la réduisirent à l’état de ruine. Puis, sous Napoléon, elle faillit disparaître à jamais. Des travaux de restauration ont heureusement été entrepris au milieu du 19e siècle pour lui rendre sa silhouette si caractéristique : quatre tours latérales et deux dômes centraux. Rien que ça ! Eh bien, cette cathédrale de mon enfance (j’ai en effet habité à Spire !) méritait un petit exposé sur le blog. J’en avais l’idée depuis longtemps… c’est maintenant chose faite !

Non loin de la cathédrale de Spire © Pierre Guernier
J’ai ressorti une vieille photo (argentique) de moi prise en 2002 sur le Pont du Soleil à Spire

 

La genèse de la cathédrale impériale de Spire

De loin déjà, la silhouette de cette église impressionne. C’est l’édifice le plus vaste et le plus important que nous ait légué l’art roman (mis à part l’abbaye de Cluny, détruite partiellement au 19e siècle). A son premier achèvement en 1106, l’église mesurait 134 m de long et 33 m de large.

La cathédrale de Spire © Friedrich Haag - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La cathédrale de Spire © Friedrich Haag – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Le sanctuaire s’élève sur une petite éminence entre le Rhin et son petit affluent, le Speyerbach.

La fondation de la cathédrale remonte à Conrad II (1024-1039), de la dynastie salienne.

L’empereur posa la première pierre en 1025. Sa construction s’échelonna entre 1027 et 1061 puis de 1082 à 1106 sous le règne de quatre empereurs saliens :

  • Conrad II (vers 990-1039),
  • Henri III (1017-1056),
  • Henri IV (1050-1106),
  • et Henri V (1081/1086?-1125).

 

La « Saint-Denis » allemande

On ne saurait dissocier Spire de la cathédrale des empereurs saliens.

A partir de 1039 et pour presque 300 ans, la cathédrale fut le lieu de sépulture de huit rois et empereurs du Saint-Empire romain germanique, ainsi que de trois impératrices et d’une princesse impériale.

La crypte impériale de la cathédrale de Spire © Altera levatur - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La crypte et les tombeaux impériaux de la cathédrale de Spire © Altera levatur – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

C’est à juste titre que l’on qualifie le Dom zu Speyer de “Cathédrale impériale”. Plus qu’aucun autre monument de l’Allemagne, elle évoque le souvenir du Saint-Empire romain germanique.

Des noms glorieux de dynasties allemandes lui sont associés: les Saliens, les Hohenstaufen, les Habsbourg et les Nassau.

 

Une nécropole pour les empereurs d’un gigantesque empire

Rappelons-nous nos cours d’histoire. Spire était donc le lieu de sépulture d’empereurs dont le territoire s’étendait sur toute la moitié est de la France actuelle : l’Alsace et la Lorraine bien sûr, mais également la Franche-Comté, Lyon, les Alpes (‘françaises’), la Provence !

Progressivement, à partir du 14e siècle, ces territoires furent rattachés au royaume de France (Lyon : 1312, Alsace : 1648 et 1681, Franche-Comté : 1678, Provence : 1481). La France gagna le duché de Savoie en 1860, à une époque où le Saint-Empire avait déjà disparu, supprimé par Napoléon en 1806…

 

Le monument le plus vaste de la Chrétienté

De cet imposant monument, dont l’architecture atteint à la perfection et qui abrite la plus grande crypte d’Allemagne, Wilhelm Pinder écrivit qu’il est “l’une des réalisations architecturales les plus grandioses qui aient jamais été conçues”.

La cathédrale de Spire vue du ciel © Kai Scherrer - licence [CC0] from Wikimedia Commons
La cathédrale vue du ciel © Kai Scherrer – licence [CC0] from Wikimedia Commons

Ainsi, les dimensions de ses hautes voûtes dépassaient tout ce qui existait au 11e siècle. C’est à Spire que l’on appliqua pour la première fois les voûtes d’arête dans une nef.

Pour la première fois, on construisait une cathédrale essentiellement en pierre, de bas en haut !

 

La cathédrale de Spire : une histoire mouvementée

En 1146, le moine cistercien Bernard de Claivaux se rendit à Spire pour rencontrer l’empereur Conrad III. Le 27 décembre, il prêcha dans la cathédrale la deuxième croisade à laquelle prirent part le roi de France Louis VII et Conrad III.

Le 28 mars 1193, c’est devant la cathédrale de Spire que le duc Léopold V d’Autriche livra le roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion à l’empereur Henri IV. Ce dernier transféra immédiatement l’illustre prisonnier anglais au château du Trifels où il resta une année en captivité.

 

Quand les Français semaient la terreur !

La ville de Spire au 16e siècle
La ville de Spire au 16e siècle

Lors de la guerre de succession du Palatinat, les troupes françaises de Louis XIV occupèrent Spire le 28 septembre 1688. 

Par crainte de l’avancée des troupes impériales allemandes, les Français incendièrent la ville le 31 mai 1689. Toutefois, on leur avait donné l’ordre d’épargner la cathédrale (dans laquelle les habitants de Spire avaient entreposé et empilé leurs meubles et affaires personnelles sur plusieurs mètres de hauteur).

Le Kaiserdom de Spire en 1610
Le Kaiserdom de Spire en 1610

Malheureusement, le feu devint incontrôlable suite à un orage dans la nuit du 2 juin. Les flammes se propagèrent autour de la cathédrale, détruisant la partie occidentale du sanctuaire.

Les soldats français pénétrèrent à l’intérieur avec l’intention de piller les tombes des empereurs allemands. Cependant, les sépultures des empereurs saliens ne furent pas profanées, les Français ayant pris la fuite.

Le lendemain matin (3 juin 1689), on constata l’étendue des dégâts.

Le grand incendie de Spire en 1689
Le grand incendie de Spire en 1689

L’intérieur de la cathédrale avait complètement brûlé, les parois occidentales et les voûtes de la nef s’étaient effondrées. Le Kaiserdom n’était plus qu’une ruine éventrée.

Seules la crypte et la sacristie furent épargnées par le feu.

 

A qui la faute ?

Selon le rapport que von Rollingens confia à l’évêque de Spire, les opinions divergeaient sur l’origine de la propagation des flammes dans la cathédrale. Etait-ce une coïncidence fatidique (l’orage de la nuit du 2 juin) ou avait-elle été préméditée par les Français ?

A ce jour, la question n’a pas trouvé de réponse par manque de preuve.

En 1697, à l’issue de la paix de Rijswijk, on autorisa les résidents à revenir habiter dans leur ville de Spire. C’est à cette époque que l’on condamna par un mur la partie orientale de la cathédrale afin de la rendre à nouveau accessible au culte.

La cathédrale de Spire en 1750
La cathédrale de Spire en 1750

La partie occidentale de la cathédrale resta en ruine car on n’avait pas les finances nécessaires pour les dégager. En 1752, une des deux tours occidentales s’effondra, occasionnant la mort d’une personne. La seconde tour fut rasée en 1757, ainsi que le reste de la partie occidentale de l’édifice en ruine (excepté le vestibule roman).

Au milieu du 18e siècle, les finances manquaient toujours pour la reconstruction de la partie occidentale la cathédrale de Spire. On peut le constater sur des gravures de l’époque.

Spire en 1750
Spire en 1750. Observez la cathédrale toujours en ruine. Les deux tours à droite seront rasées 2 ans plus tard.

On eut dès lors l’idée d’aménager la façade occidentale donnant sur la Maximilianstraße à la va-vite dans le style baroque contemporain.

Cette « façade de secours » visait surtout à redonner à la cathédrale sa longueur d’origine. Elle consistait en trois portails flanqués de supports pyramidaux. Une lanterne centrale vitrée surmontait le tour, elle-même flanquée de deux tourelles en forme de minaret.

La façade occidentale de la cathédrale de Spire en 1840
La façade occidentale de la cathédrale en 1840

 

Le retour des Français

En 1794, les troupes révolutionnaires ravagèrent la cathédrale et profanèrent l’église.

La prise de Spire par les Révolutionnaires en 1792
La prise de Spire par les Révolutionnaires en 1792. Notez que cette gravure française est incorrecte : la cathédrale était encore en ruine suite au grand incendie de 1689

Sous Napoléon Bonaparte, les troupes françaises utilisaient la cathédrale comme étable et entrepôt d’intendance militaire. 

Le traité de Lunéville du 9 février 1801 rattacha toute la rive gauche du Rhin à la France. La cathédrale devint propriété de l’Etat français.

Par le Concordat de 1801 et la bulle de circonscription « Qui Christi Domini vices » du 29 novembre 1801, le pape Pie VII reconnut l’abolition du diocèse de Spire au profit de celui de Mayence.

 

Napoléon à la rescousse !

La cathédrale étant en si mauvais état, on planifia en 1805 de la démolir. L’architecte Peter Henrion avait prévu de convertir ce qui restait de la partie occidentale du Kaiserdom en arc de triomphe.

Cependant, le conseil municipal de Spire refusa de couvrir les coûts nécessaires à la démolition. De son côté, l’évêque de Mayence Joseph Ludwig Colmar établit de bonnes relations avec l’épouse de Napoléon, l’impératrice Joséphine de Beauharnais et le ministre français de la Culture Jean-Étienne-Marie Portalis. Il usa de sa bonne influence pour les convaincre de l’importance culturelle et exceptionnelle de la cathédrale.

Ainsi, Napoléon accepta de retirer l’ordre de démolition déjà émis. Par un décret impérial du 23 septembre 1806, il ordonna le retour de la cathédrale aux catholiques de Spire, qui étaient également tenus responsables des futurs frais d’entretien. La cathédrale de Spire était sauvée !

Après la défaite de Napoléon, le diocèse de Spire fut rétabli et l’église paroissiale retrouva son rang de cathédrale.

 

Les ultimes restaurations

On rénova le sanctuaire de 1818 à 1822 et le roi Louis Ier de Bavière fit exécuter des fresques dans le style nazaréen pour les installer dans la nef en 1853.

Au nom du roi de Bavière Louis Ier, de l’empereur autrichien François-Joseph Ier et du duc Adolph von Nassau, on confia à l’architecte réputé Heinrich Hübsch la reconstruction tant attendue de la façade occidentale.

La reconstruction de façade occidentale du Kaiserdom de Spire en 1857
La reconstruction de façade occidentale du Kaiserdom en 1857

L’architecte allemand s’acquitta de la tâche de 1854 à 1858 en s’inspirant librement du bâtiment original. Certes, la cathédrale récupéra ses deux tours latérales et son dôme occidental. Mais la façade différait considérablement de l’original tant par le choix des matériaux que par ses proportions.

Avant-Après : la façade occidentale de la cathédrale de Spire (image par French Moments)
Avant-Après : la façade occidentale de la cathédrale de Spire (image par French Moments)

Ceci étant, la cathédrale de Spire retrouva sa belle silhouette, 169 ans après !

La cathédrale de Spire vers 1922
La cathédrale vers 1922

Au début du 20e siècle, les clochers de deux nouvelles églises dépassèrent en hauteur celles de la cathédrale : Saint-Joseph (deux tours de 90 mètres) et l’église de la Commémoration protestante : la Gedächtniskirche (100 m).

La skyline de Spire vue depuis les bords du Rhin Stock Photos from Philmoto / Shutterstock
La skyline de Spire vue depuis les bords du Rhin Stock Photos from Philmoto / Shutterstock

 

La dernière campagne de restauration du 21e siècle

En 1925, le pape XI l’éleva au rang de basilique papale.

La cathédrale fut l’un des premiers sites d’Allemagne à figurer sur la liste de l’Unesco (1981).

Elle reçut la visite du pape Jean-Paul II le 4 mai 1987 lors de sa tournée des cathédrales en Allemagne.

Pape Jean-Paul II à Spire en 1987 © Francis Guernier
Le Pape Jean-Paul II à Spire le 4 mai 1987 © Francis Guernier

Les abords de la cathédrale – et notamment son parvis – ont été réaménagés à la fin des années 1980 à temps pour les 2000 ans de la ville de Spire, célébrés en 1990.

La dernière campagne de restauration est en voie d’achèvement au moment de la rédaction de cet article. Initiée en 1996, elle devait se terminer en 2019. En raison de dommages imprévus constatés sur la structure du toit et le dôme à la croisée du transept, la fin des travaux est prévue pour la mi-2021.

 

La cathédrale du chancelier allemand !

Le chancelier allemand Helmut Kohl participa à la renommée mondiale de la cathédrale de Spire en y conviant de nombreux chefs d’état et dignitaires étrangers.

  • 1985 : le premier ministre chinois Zhao Ziyang
  • 1986 : le premier ministre français Jacques Chirac
  • 1987 : le pape Jean-Paul II
  • 1989 : la première ministre britannique Margaret Thatcher
  • 1990 : le président soviétique Michael Gorbatchev et le président américain George Bush
  • 1994 : le premier ministre français Edouard Balladur et le président russe Boris Eltsine
  • 1995 : le premier ministre britannique John Major
  • 1996 : le premier ministre espagnol José Maria Aznar
  • 1997 : le roi Juan Carlos et la reine Sofia d’Espagne

A la mort d’Helmut Kohl, survenue à Ludwigshafen le 16 juin 2017, à l’âge de 87 ans, le parlement européen à Strasbourg lui rendit hommage le 1er juillet. Au même moment, une cérémonie privée eut lieu à la cathédrale de Spire avant l’inhumation de l’ancien chancelier dans le vieux cimetière du parc Adenauer à Spire.

 

La cathédrale de Spire : faits et chiffres

Voici la vue de la cathédrale de Spire qu’on aurait d’une hauteur comparable à celle de la Tour Eiffel (330 m) :

La cathédrale de Spire vue du ciel © Google Earth
La cathédrale de Spire vue du ciel © Google Earth

On reconnait bien le plan d’une croix latine, les quatre tours et les deux dômes.

  • Nom officiel : cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption-et-Saint-Étienne (Domkirche St. Maria und St. Stephan)
  • Autres noms : Dom zu Speyer, Kaiserdom, Speyerer Dom, cathédrale de Spire (FR), Speyer Cathedral (ENG)
  • Sanctuaire édifié sur le plan d’une croix latine
  • Matériaux utilisés : grès jaune et rouge du Palatinat.
  • Début des travaux : 1025
  • Fin des travaux : 1106
  • Surface du bâti (fondations comprises) : environ 220 000 m²
  • Longueur totale de l’édifice : 134 m (145 m à Amiens)
  • Hauteur de la nef centrale : 33 m (41,41 m à Metz)
  • Largeur de la nef centrale : 14 m
  • Largeur de la nef : 37,62 m
  • Nombre de tours : 6 (4 tours latérales et 2 dômes centraux)
  • Hauteur des tours orientales : 71,20 m
  • Hauteur des tours occidentales : 65,60 m (Gedächtniskirche: 100 m)
  • Elévation du dôme oriental au-dessus du transept : 58 m
  • Elévation du dôme occidental au-dessus du narthex : 53,60 m
  • Surface de la crypte : 850 m² 
  • Nombre de cloches : 9
  • Poids total des cloches dans le dôme occidental : 12 tonnes
  • Surface du toit : équivalente à la taille d’un terrain de football

 

A propos de l’appellation Dom et Kaiserdom

Vue romantique de la cathédrale de Spire en 1858
Vue romantique de la cathédrale de Spire en 1858

Dom est le nom allemand que l’on donne à des cathédrales. Il dérive du latin domus “Maison” car ces sanctuaires sont considérés comme une domus Dei, une “maison de Dieu”. A Spire, la cathédrale a pour synonyme Kaiserdom, en référence à l’empereur du Saint-Empire romain germanique. Des appellations similaires existent également en Italie : par exemple, le fameux duomo de Florence.

 

Le sceau et le blason de Spire

Du 13e au 19e siècle, la cathédrale impériale figurait sur le sceau de la ville de Spire (depuis sa face nord). Le sceau contenait également une représentation de la Vierge.

Sceau de la ville de Spire

En 1846, le roi de Bavière (la Bavière comprenait alors le Palatinat et Spire) changea le blason de la ville. Il choisit de représenter la façade occidentale de la cathédrale qui était plus reconnaissable.

Blason de Spire

 

La façade occidentale

Vue de la façade occidentale de la cathédrale de Spire © French Moments
Vue de la façade occidentale de la cathédrale de Spire © French Moments

La façade occidentale, d’inspiration néo-romane, est une reconstruction datant des années 1854-1858. Elle se singularise par l’alternance de pierres rouges et jaunes, une référence à la période romane-salique.

 

Une façade romane richement ornée

Détail de la façade occidentale de la cathédrale de Spire © French Moments
Détail de la façade occidentale de la cathédrale de Spire © French Moments

Contrairement à de nombreuses églises romanes, la façade de la cathédrale est richement ornée.

 

Les portails

La façade comprend trois portails. Le portail central est le plus grand et le plus orné.

On peut y observer une quantité de petites statues ou figurines, tel un étonnant vendeur de bretzel… la statue s’inspire d’un vrai personnage qui vendait des bretzels à Spire lors de la reconstruction de la façade occidentale !

Le Bretzel-Mann (portail occidental) © Manuae - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
Le Bretzel-Mann (portail occidental) © Manuae – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

Remarquez l’aigle impérial (bicéphale) sur la clé de voûte de l’arc du portail central. Il symbolise le pouvoir de l’empereur du Saint-Empire romain germanique. A l’époque de la reconstruction de la façade occidentale, l’aigle à deux têtes était presque indissociable des Habsbourg-Lorraine.

Pourtant, en 1857, Spire et le Palatinat se situaient sur les terres du roi de Bavière, Louis Ier, de la dynastie Wittelsbach. Alors pourquoi a-t-on mis les armes des Habsbourg-Lorraine en évidence sur la façade ?

Cette contradiction s’explique assez simplement. La famille impériale autrichienne ne voulait soutenir financièrement la reconstruction de la façade que si l’on pouvait y observer son influence.

Voici pourquoi on retrouve en place de choix les trois éléments des armoiries de la famille impériale : le lion (emblème historique des Habsbourg), le blason autrichien et les trois alérions du blason de Lorraine.

L'aigle bicéphale (façade occidentale) © AnRo0002 - licence [CC0] from Wikimedia Commons
L’aigle bicéphale (façade occidentale) © AnRo0002 – licence [CC0] from Wikimedia Commons

Les deux autres dynasties ayant participé au financement de la reconstruction n’ont pas été oubliées : leurs armes se retrouvent sur la clé de voûte des plus petits portails sur la gauche (Nassau) et la droite (Wittelsbach).

 

Les patrons de la cathédrale

Entre les trois portails et la rosace se trouvent les sculptures des cinq patrons de la cathédrale (de gauche à droite) :

  • Saint-Etienne, martyr et saint-patron de la cathédrale
  • l’archange Michel défendant l’Allemagne
  • la vierge Marie, à qui l’église est dédiée
  • Saint Jean-Baptiste, en référence à la cathédrale qui fut première église baptismale du diocèse
  • Bernard de Clairvaux, le plus célèbre visiteur de la cathédrale au moyen-âge (Noël 1146)
Les grandes statues de la façade occidentales © Hermann Luyken - licence [CC0] from Wikimedia Commons
Les grandes statues de la façade occidentales © Hermann Luyken – licence [CC0] from Wikimedia Commons

La rosace

Au centre, la grande rosace au milieu de laquelle se trouve une tête de Christ. Dans les quatre écoinçons de la rosace figurent les symboles des quatre évangélistes.

La rosace de la façade occidentale © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La rosace de la façade occidentale © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Le dôme central

Le dôme central de la façade occidentale est de forme octogonale. Il sert de clocher et abrite neuf cloches dont quatre coulées en 1822.

Le dôme occidental © Kmtextor - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Le dôme occidental © Kmtextor – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Par ailleurs, les quatre tours de la cathédrale n’ont jamais porté de cloche.

 

Le Kaisersaal et la plate-forme d’observation

Depuis 2012, la salle du Kaiser (Kaisersaal) qui se trouve au-dessus du hall du Kaiser (Kaiserhalle) est accessible au public par un escalier de 90 marches. La salle renferme neuf fresques monumentales du peintre Johann Baptist Schraudolph qui étaient autrefois visibles dans la nef. Ces œuvres d’art dépeignent des scènes de la vie de Bernard de Clairvaux et de Saint-Etienne.

La salle du Kaiser (Kaisersaal) © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La salle du Kaiser (Kaisersaal) © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Du Kaisersaal, on a accès à la tour occidentale-sud, également ouverte aux visites. Les escaliers (214 marches) mènent à une plate-forme d’observation installée à une hauteur de 55 mètres, juste sous le sommet de la tour. Vous pouvez y admirer une vue unique sur la ville histoirque de Spire et la plaine du Rhin, de Neustadt à Heidelberg. Par beau temps, la vue s’étend à plus de 50 km.

Vue de la tour sud-ouest © TeKaBe - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Vue de la tour sud-ouest © TeKaBe – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

La galerie naine

Une galerie naine fait le tour de l’extérieur de la cathédrale. Cet élément décoratif typiquement roman est une arcade ouverte marquée vers l’extérieur par une galerie de colonnes (haute de 2,90 m). Il est possible de déambuler le long de la galerie (des visites exclusives sont organisées avec des professionnels dans le respect des règles de sécurité).

La galerie naine au transept © Tilman2007 - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
La galerie naine au transept © Tilman2007 – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

La galerie naine est une caractéristique des églises romanes situées en Rhénanie. Elle semble avoir été importée d’Italie. En effet, la galerie naine est similaire à d’autres modèles de galeries en Italie du Nord et en Toscane. Toutefois, la galerie naine est discontinue dans les deux autres grandes cathédrales impériales de Worms et Mayence.

Galerie naine © AnRo0002 - licence [CC0] from Wikimedia Commons
Galerie naine © AnRo0002 – licence [CC0] from Wikimedia Commons
La galerie naine © TeKaBe - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
La galerie naine © TeKaBe – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
 

Le chevet

Il faut contourner la cathédrale par le parc pour admirer le magnifique chevet de style roman lombard, un des plus beaux d’Europe. Le gracieux chevet forme en effet un ensemble architectural d’une incomparable beauté, en accord harmonieux avec les deux tours et le dôme central.

Le chevet de la cathédrale de Spire © dronepicr - licence [CC BY 2.0] from Wikimedia Commons
Le chevet du Kaiserdom © dronepicr – licence [CC BY 2.0] from Wikimedia Commons

L’abside semi-circulaire est décorée de sept fausses arcades dans lesquelles sont percées cinq fenêtres cintrées. Des chapiteaux de style roman surmontent les colonnes.

L’abside se termine par une galerie naine en forme de balcon qui court sous le toit conique.

Vient ensuite un toit à pignon qui présente une série de cinq niches originellement destinées à abriter des statues de saints. Celui-ci est orné d’une frise cintrée.

Enfin, le dôme octogonal trône sur le toit à pignon. Le chevet harmonique est complété par deux tours jumelles culminant à 71 m.

La cathédrale de Spire vue sous l'arche de la tour des Païens © Roman Eisele - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La cathédrale de Spire vue sous l’arche de la tour des Païens © Roman Eisele – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Le modèle de ce chevet se retrouve presque à l’identique sur celui de la cathédrale de Mayence.

 

Les tours de la cathédrale

Tours de la cathédrale de Spire

Comparée à une tour gothique, la structure des tours romanes de la cathédrale de Spire est extrêmement simple.

A leur base, les quatre tours élancées de l’église sont de plan carré et se terminent par quatre pignons. 

Les trois derniers étages de la tour présentent des ouvertures groupées par paires et/ou par trois, divisées par des colonnes. Ces niveaux sont marqués par les lésènes. Il s’agit de bandes verticales de faible relief, étroites et légèrement saillantes dans l’épaisseur d’un mur extérieur.

Les tours sont couronnées de flèches rhomboïdales. Il s’agit d’une singularité romane qui n’est présente que sur les bords du Rhin. Par ailleurs, elle ne fut guère imitée en France (excepté quelques exemples dans le nord-est : l’église Sainte-Foy de Sélestat et le Temple-Neuf à Metz).

Eglise Sainte-Foy, Sélestat © French Moments
Les flèches rhomboïdales de l’église Sainte-Foy de Sélestat © French Moments

Ces couronnements consistent en une pyramide à huit pans. Techniquement, quatre des arêtiers posent sur les angles de la tour et les quatre autres sur l’extrémité des quatre pignons.

  • Les deux tours du chevet (orientales) sont les plus anciennes et les plus hautes (71 m).
  • Les tours de la façade occidentale, plus récentes (19e s.), sont plus minces et légèrement plus basses (65 m).

 

La toiture vert-de-gris

La cathédrale de Spire se reconnait de loin à sa toiture de cuivre vert-de-gris.

Vue de la tour sud-ouest sur le chevet de la cathédrale © AnRo0002 - licence [CC0] from Wikimedia Commons
Vue de la tour sud-ouest sur la toiture et le chevet de la cathédrale © AnRo0002 – licence [CC0] from Wikimedia Commons

A l’origine, l’église était recouverte d’une toiture en ardoise (comme celle de la sacristie gothique).

C’est une des particularités qu’elle partage avec une autre grande cathédrale, celle de la ville jumelée de… Chartres !

 

Le décor roman de l’extérieur

En se promenant autour de la cathédrale, on peut apercevoir de beaux motifs décoratifs propres à l’art roman : frises, bas-reliefs…

Vous en trouverez notamment autour des fenêtres cintrées des transepts nord et sud.

Cathédrale de Spire - Frise entourant une baie cintrée du transept © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Frise entourant une baie cintrée du transept © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Cathédrale de Spire - Sculptures romanes sur une colonne © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Sculptures romanes sur une colonne © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Cathédrale de Spire - Baie cintrée du transept © Shesmax - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Baie cintrée du transept © Shesmax – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Cathédrale de Spire - La galerie naine et les frises romanes © Shesmax - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La galerie naine et les frises romanes © Shesmax – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Cathédrale de Spire - Frise romane © Shesmax - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Frise romane © Shesmax – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
 

L’intérieur de la cathédrale

Dès l’entrée dans le narthex, le ton est donné.

C’est du grandiose.

Le Narthex de la cathédrale de Spire © BlueBreezeWiki - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
Le Narthex de la cathédrale © BlueBreezeWiki – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

L’intérieur du vestibule abrite 8 statues des empereurs et rois inhumés dans la cathédrale, notamment celle de Conrad II.

On retrouve aussi les bustes des bienfaiteurs impériaux et royaux de la cathédrale dont :

  • l’empereur d’Autriche-Hongrie François-Joseph Ier de la maison des Habsbourg-Lorraine
  • les deux rois bavarois Louis Ier et Maximillien II de la maison de Wittelsbach

Ainsi, avant de pouvoir entrer dans la cathédrale pour prier Dieu, vous devez d’abord passer devant les dirigeants du monde de ce milieu du 19e siècle.

Fresques du narthex de la cathédrale de Spire © José Luiz Bernardes Ribeiro - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Fresques du narthex de la cathédrale © José Luiz Bernardes Ribeiro – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

La nef

Lorsqu’on pénètre dans la nef, on a cette sensation d’élévation que l’on ressent généralement à l’intérieur des grandes cathédrales gothiques.

La nef de la cathédrale de Spire © TeKaBe - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La nef de la cathédrale © TeKaBe – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

En effet, malgré le fait que l’édifice soit de style roman, la hauteur des voûtes est considérable : 33 mètres.

C’est bien plus haut que les deux autres cathédrales impériales de :

  • Mayence (28 m) et
  • Worms (27 m).

C’est presque autant que Notre-Dame de Paris (33,5 m) et supérieur à d’autres cathédrales françaises de style gothique :

  • Saint-Jean de Lyon (32,5 m),
  • Notre-Dame de Strasbourg (31 m),
  • basilique de Saint-Nicolas-de-Port (30 m) et
  • Notre-Dame de Rouen (28 m).
La nef du Kaiserdom © DerHexer - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La nef du Kaiserdom © DerHexer – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Les voûtes en berceau sur arcs-doubleaux sont d’influence lombarde. Les arcs sont composés de claveaux en grès alternant les couleurs rouge et gris clair.

La nef de la cathédrale de Spire © BlueBreezeWiki - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
La nef © BlueBreezeWiki – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

Un des bas-côtés :

Cathédrale de Spire - Un des bas-côtés de la nef © BlueBreezeWiki - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
Un des bas-côtés de la nef © BlueBreezeWiki – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

La symbolique de la nef

Comme la plupart des cathédrales érigées au moyen âge, celle de Spire oriente le fidèle uniquement vers l’est, à la rencontre de la lumière.

En longeant la nef centrale, on remarque que la nef repose sur 12 arcs soutenus par d’imposants piliers. Ce nombre parle de l’Église qui s’appuie sur le fondement des 12 Apôtres (Ephésiens 2:20).

En dirigeant son regard plus vers le haut, on peut voir que les arcades sont regroupées et voûtées par deux, soutenant 6 voûtes. La voûte d’une nef symbolisait au moyen âge le Ciel. Quant aux six voûtes, elles représentent les six jours de la création dans la Genèse (soit la vie terrestre).

 

Le premier autel

L’autel, surélevé par rapport à la nef, se situe avant la croisée du transept.

Le chœur de la cathédrale de Spire © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
L’autel de la cathédrale de Spire © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

La couronne Salienne

L’énorme couronne suspendue juste avant la croisée du transept est une réplique à grande échelle (500 kg) de la couronne funéraire de Conrad II. Elle signale l’emplacement du tombeau de l’empereur salien dans la crypte.

La couronne salienne à Spire © José Luiz Bernardes Ribeiro - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La couronne salienne © José Luiz Bernardes Ribeiro – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

La couronne funéraire de Conrad II originale fait partie du trésor de la cathédrale.

 

La croisée du transept et la coupole

La croisée du transept est impressionnante. Comme dans les cathédrales de Rhénanie (Mayence, Worms, Strasbourg) ou en Normandie, on y trouve un dôme ou tour lanterne.

Cathédrale de Spire - Le dôme à la croisée du transept © Berthold Werner - licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons
Le dôme à la croisée du transept © Berthold Werner – licence [CC BY-SA 3.0] from Wikimedia Commons

Comme on l’a vu, les six voûtes de la nef font référence aux six jours de la création. Le Ciel, quant à lui, s’ouvre au-dessus de la croisée du transept dans une grande coupole.

Cette coupole symbolise le septième jour, durant lequel le Créateur se reposa.

La coupole a une forme octogonale. Le nombre huit (7 + 1) signifie que pour les chrétiens, le vrai jour de repos n’est pas le sabbat des Juifs, mais le dimanche, le jour après le sabbat. Le dimanche est le jour de la Résurrection et ainsi de l’achèvement de la création. C’est ce que le nombre 8 souhaite exprimer : le dimanche est le premier jour de la semaine et en même temps le huitième.

 

Le grand autel

Directement sous la coupole de la croisée, se trouve le grand autel, signe de la présence du Christ.

Ce second autel est lui-même surélevé par rapport au premier. Ceci s’explique par la présence de la crypte, située juste en-dessous.

 

Le chœur

C’est ici que se trouve la cathedra, le siège de l’évêque de Spire, à gauche du grand autel.

Le chœur et la cathedra de l'évêque de Spire (à gauche) © Gerd Eichmann - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Le chœur et la cathedra de l’évêque de Spire (à gauche) © Gerd Eichmann – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Le chœur est assez sobre et fait ressortir les éléments propres au style roman. Ici, les stalles sculptées sont de facture contemporaine.

L'abside du Kaiserdom © José Luiz Bernardes Ribeiro - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
L’abside © José Luiz Bernardes Ribeiro – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Le chœur symbolise avec l’abside le Christ, la Tête pour l’Église (Ephésiens 1 : 22). Comme le corps reçoit la lumière et la vie par la tête, ainsi en est-il de la lumière du matin qui arrive de l’est dans la cathédrale. Ceci explique pourquoi le chœur est aussi le lieu réservé à l‘évêque en tant que chef de l’église locale. C’est ici qu’il récite les prières des offices, avec le chapitre de la cathédrale.

 

La Croix de Triomphe

La puissante croix suspendue au-dessus de l’autel principal date de 1906. Œuvre néo-romane de l’artiste munichois Otto Hupp (1859-1949), elle symbolise la victoire obtenue par Jésus-Christ sur la mort. C’est la raison pour laquelle elle porte le nom de “Croix de Triomphe” (Triumphkreuz).

 

La croix de triomphe, Kaiserdom de Spire © Tilman2007 - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La croix de triomphe © Tilman2007 – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

L’abside

A l’extrémité orientale de la cathédrale de Spire, le choeur est réduit à une simple abside voûtée en cul-de-four, sans déambulatoire, comme à la cathédrale de Strasbourg.

L’abside est animée par des arcades aveugles au-dessus desquelles se trouve la voûte formée d’une demi-coupole. Celle-ci est aujourd’hui recouvertes de peinture blanche. Toutefois, jusqu’en 1957, une fresque monumentale décorait l’abside : « Le couronnement de Marie ». Celle-ci est aujourd’hui exposée dans le Kaisersaal.

Cette photo retouchée de 1930 vous donne un aspect de ce qui décorait les voûtes de l’abside et du chœur jusque dans les années 1950 :

Aspect des fresques de l'abside vers 1930. Photo par Joachim Specht [Domaine Public]
Aspect des fresques de l’abside vers 1930. Photo par Joachim Specht [Domaine Public]

Les chapelles

Deux chapelles se trouvent sur chaque côté de la cathédrale :

  • la chapelle Saint Afra (côté nord), du nom d’un des premiers martyrs chrétiens. Il se trouve que l’empereur Henri V était né le jour de la fête du saint.
  • la chapelle double (côté sud). Commencée en 1050, il s’agit d’une chapelle à deux niveaux. La chapelle basse est consacrée à Saint-Emmeram et Saint-Martin. Elle sert de baptistère. La chapelle haute, restaurée en 1857, est dédiée à Sainte Catherine d’Alexandrie. Les deux chapelles sont reliées par une ouverture octogonale.

La chapelle inférieure Saint-Martin © Tilman2007 - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La chapelle inférieure Saint-Martin © Tilman2007 – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La chapelle supérieure Sainte Catherine © DerHexer - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La chapelle supérieure Sainte Catherine © DerHexer – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
 

La crypte du Kaiserdom

Il s’agit d’une des parties les plus anciennes du Kaiserdom, consacrée en 1041. La crypte se situe sous le transept et le chœur. Il s’agit de la plus grande salle romane à colonnes d’Europe.

La crypte romane de la cathédrale de Spire © Tilman2007 - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
La crypte romane du Kaiserdom © Tilman2007 – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

D’emblée, l’œil du visiteur est attiré par la magnifique alternance rythmée des colonnes faites de pierres rouges et jaunes. La lumière tamisée donne à la crypte cette atmosphère si particulière.

La crypte de la cathédrale de Spire comprend les tombes des souverains suivants :

  • Conrad II († 1039)
  • Gisèle de Souabe († 1043), impératrice, épouse de Conrad II.
  • Henri III († 1056), fils de Conrad II.
  • Henri IV († 1106), fils de Henri III.,
  • Berthe de Savoie († 1087), impératrice, épouse de l’empereur Henri IV.
  • Henri V († 1125), fils de Henri IV.
  • Béatrice de Bourgogne († 1184), seconde épouse de Frédéric Barberousse, et sa fille Agnès († 1184)
  • Philippe de Souabe († 1208), fils de Frédéric Barberousse
  • Rodolphe de Habsbourg  († 1291)
  • Adolphe de Nassau († 1298)
  • Albert d’Autriche († 1308), fils de Rodolphe de Habsbourg
  • ainsi que cinq évêques de Spire

Les historiens estiment que la dalle funéraire de Rodolphe de Habsbourg est le premier portrait réaliste connu d’une personnalité du Moyen Âge.

La dalle funéraire de Rodolphe de Habsbourg dans la crypte du Kaiserdom © French Moments
La dalle funéraire de Rodolphe de Habsbourg dans la crypte du Kaiserdom © French Moments

Pour l’anecdote, la crypte de la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg, alors édifice de style roman, s’inspira de celle de Spire.

La visite de la crypte est payante, le droit d’entrée permettant de soutenir l’entretien de la cathédrale.

 

Autour de la cathédrale de Spire

La gigantesque cathédrale romane est aujourd’hui entourée d’un parc (Domgarten). Par le passé, de nombreux bâtiments cultuels et administratifs l’entouraient, permettant alors de mieux juger la longueur considérable de l’édifice (plus de 133 mètres !)

Dans le parc de la cathédrale de Spire © Kmtextor - licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons
Dans le parc de la cathédrale © Kmtextor – licence [CC BY-SA 4.0] from Wikimedia Commons

Devant la cathédrale se trouve une maquette du Kaiserdom à l’échelle 1:100. Elle est en particulier destinée aux personnes malvoyantes.

 

Le Mont des Oliviers (Ölberg) fut construit de 1505 à 1512 par Jans Seyffer de Heilbronn. Il se dressait autrefois au centre de la cour intérieure du cloître. Le groupe sculptural représente l’arrestation de Jésus dans le jardin des oliviers. Le toit fut ajouté au 19e siècle pour protéger les statues déjà éprouvées par le temps.

Le Mont des Oliviers (Ölberg). Photo : Immanuel Giel [Domaine Public]
Le Mont des Oliviers (Ölberg). Photo : Immanuel Giel [Domaine Public]

La Tour des Païens (Heidentürmchen) est une ruine des remparts médiévaux de Spire construite vers 1280. Il s’agit d’une fortification avec deux tourelles d’escalier. Sur les 68 tours que comptaient les remparts de Spire, c’est la seule porte avec l’Altpörtel qui nous est parvenue.

La tour des Païens. Photo : Immanuel Giel [Domaine public]
La tour des Païens. Photo : Immanuel Giel [Domaine public]

Pour résumer, la « French Connexion » de la cathédrale de Spire !

Pour terminer cet article, petit résumé des liens historiques et architecturaux entre la cathédrale de Spire et la France.

  • Spire est une ville située à 60 km de la frontière franco-allemande.
  • Tous les empereurs du Saint-Empire romain germanique qui reposent dans la crypte de la cathédrale régnaient sur un vaste territoire qui s’étendait sur toute la façade est de la France actuelle (Lorraine, Alsace, Franche-Comté, Lyon, Savoie, Dauphiné, Provence)
  • La crypte de la cathédrale de Spire a inspiré celle de Notre-Dame de Strasbourg.
  • Le moine bourguignon Bernard de Clairvaux s’y rendit 1146 pour y prêcher la 2e croisade. Sa mission fut un succès puisqu’il convainquit l’empereur Conrad III de s’engager aux côtés du roi de France Louis VII. Bernard de Clairvaux a sa statue sur la façade occidentale de l’édifice.
  • Au printemps 1689, les troupes françaises de Louis XIV semèrent la désolation dans le Palatinat. Ils incendièrent Spire et sa cathédrale.
  • A la Révolution française, les troupes révolutionnaires profanèrent la cathédrale, la transformant en étable et entrepôt.
  • Au traité de Lunéville du 9 février 1801, la cathédrale devint propriété de l’Etat français.
  • Par un décret impérial du 23 septembre 1806, Napoléon ordonna le retour de la cathédrale aux catholiques de Spire, évitant au Kaiserdom une destruction certaine.
  • la cathédrale de Spire a servi d’inspiration à deux bâtiments érigés pendant l’époque allemande à Metz en Lorraine : le beffroi de la gare de Metz et le Temple-Neuf (1901-1905).
  • La toiture couverte de cuivre vert-de-gris n’est pas sans rappeler celle de la cathédrale de Chartres (ville jumelée à Spire), où plus proche, Notre-Dame de Strasbourg.
  • La cathédrale accueillit deux premiers ministres français en voyage officiel en Allemagne : Jacques Chirac (1986) et Edouard Balladur (1994).
Croisière en bateau solaire sur la Moselle à Metz © French Moments
La cathédrale de Spire a inspiré l’architecture du Temple-Neuf à Metz © French Moments

 

Autres images de la cathédrale de Spire

Un dernier point que je voulais préciser… j’ai vécu à Spire bien avant l’apparition des appareils photos numériques (ça ne rajeunit pas !!) et, même si cette cathédrale m’est familière, je n’ai pas eu l’occasion d’y revenir dernièrement pour l’immortaliser sur la pellicule… vous ne m’en voudrez donc pas d’avoir utilisé des photos libres de droit pour illustrer cet article !

Cathédrale de Spire en Allemagne © French Moments
Devant la cathédrale de Spire fin des années 1990 ! 🙂

Ah si, je vais quand même mettre ma touche personnelle avec cette illustration. Je l’ai dessinée et coloriée avec des crayons feutres lorsque j’étais enfant !

Mes dessins d'enfant de la cathédrale de Spire © Pierre Guernier
Mes dessins d’enfant de la cathédrale de Spire

Voyez-vous, déjà à l’époque, je manifestais de l’intérêt pour les beaux monuments !

 

Images pour Pinterest

Cathédrale de Spire © French Moments  Cathédrale de Spire © French Moments  Cathédrale de Spire © French Moments  Cathédrale de Spire © French Moments

 

Pour terminer, quelques anciennes cartes postales de la cathédrale de Spire que j’ai retrouvées dans ‘une vieille malle du grenier’ !

Vue d'ensemble de la cathédrale de Spire
La cathédrale de Spire et le Rhin vus du ciel
Le chevet de la cathédrale de Spire
Le chevet de la cathédrale de Spire

 

La cathédrale en timbres-postes

Et pour les collectionneurs de timbres-postes, peut-être avez-vous celui-ci datant de 1924 ?

Le Kaiserdom de Spire en version timbre (1924)

On notera quelques erreurs de représentation … regardez le chevet, en réalité, l’espace entre le toit semi-circulaire et le toit à pignon de l’édifice ne comporte que 5 niches vides !

Ou bien, ce timbre commémorant les 900 ans de la cathédrale :

Timbre pour les 900 ans de la cathédrale (1961)
Timbre pour les 900 ans de la cathédrale (1961)

Ici également, l’erreur des 5 niches a été reproduite !

 

Le timbre des 2000 ans de la ville (1990) :

Timbre de 1990 pour les 2000 ans de Spire
Timbre de 1990 pour les 2000 ans de Spire

Enfin une reproduction à l’identique… notez qu’il y a bien les 5 niches ! 🙂

 

Et le petit dernier (1995) :

Timbre de 1995
Timbre de 1995

 

Pour en savoir plus sur le Kaiserdom de Spire

A propos de l'auteur

Pierre a grandi en Alsace, en Lorraine et en Allemagne avant de s’établir en Australie. Passionné de la France et de sa culture, il a fondé French Moments, une organisation initialement basée à Sydney qui promeut notre beau pays au public anglophone. En 2014, il est revenu s’installer en Europe avec son épouse Rachel et sa petite fille Aimée. Professeur d’économie et de management en BTS, Pierre est également formateur de français en langue étrangère et guide touristique. Après avoir résidé quelques années en Ile de France et en Savoie, il promeut aujourd'hui la France depuis l'East Sussex en Angleterre.

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Laissez un commentaire !

  • Bonjour Pierre:
    Encore une nouvelle fois un grand bravo pour cette visite de la cathédrale de Spire (Speyer),
    je me permets de vous signaler une petite faute de frappe en début d’article:
    les quatre empereurs saliens:
    Konrad II (roi 2024 – empereur 1027 )
    Henri III (roi 1028 – empereur 1046)
    Henri IV (roi 1053 – empereur 1084, destitué 1105)
    Henri V (roi 1098 – empereur 1111)
    Avec mes cordiales salutations, Georges.

  • Comme d’habitude: bien documenté et bien illustré. En un mot: excellent.
    Merci Pierre pour tous ces « reportages » que nous apprécions beaucoup.
    Continuez comme ça et nous serons contents.

  • Tres beau, bonne explication…La cathedral de Strasbourg aussi a une longue history, will you ever have a story about it ?..Bonne Journee a vous..
    J’ai grandi a Strasbourg ….15 ans…..

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