L’arc de triomphe Héré est un monument qui complète de façon majestueuse la place royale de Nancy. Edifié au milieu du 18e siècle, il honore le gendre du roi Stanislas, Louis XV. Mais plus encore, il contribue à la belle perspective que Stanislas Leszczyński a souhaité créer dans sa capitale. L’arc monumental – ou Porte Héré – est ainsi le trait d’union entre la place Stanislas à la place de la Carrière.
L’arc de triomphe Héré : le projet
Lorsque Stanislas souhaita créer une place royale à Nancy, il choisit de la réaliser dans l’axe de la place de la Carrière. Or, jusqu’au milieu du 18e siècle, l’espace était occupé par deux vieux bastions militaires : ceux de Vaudémont (à l’est) et de Haussonville (à l’ouest), eux-mêmes reliés par un rempart.
Les fortifications séparaient les deux villes de Nancy :
- la Ville-Vieille (d’origine médiévale) et
- la Ville-Neuve (construite par le duc Charles III pendant la Renaissance).
Aussi, pour réaliser sa place royale, Stanislas demanda les services d’Emmanuel Héré (1705-1763), un architecte baroque lorrain.
Héré conçut un plan qui n’exigeait pas la démolition des fortifications. Ainsi, la place serait bâtie sur trois côtés. Sur le côté nord, les fossés seraient comblés pour accueillir deux pavillons bas. Ces bâtiments permettraient de fermer la place… tout en restant moins hauts que les remparts derrière eux.
Entre ces deux pavillons bas – et dans l’axe de l’Hôtel de Ville -, les remparts étaient percés d’une porte permettant le passage entre les deux villes. La porte dite Royale fut largement remaniée par Héré. Elle devint un véritable arc de triomphe à la gloire de Louis XV.
Le coup de maître d’Héré
Ainsi, Héré réussit un coup de maître :
- en masquant les vieux bastions qui séparaient les deux villes par l’édification de pavillons à basse hauteur,
- en créant un monument majestueux qui ne supprimerait pas le rempart séparant les deux villes,
- ceci dans l’axe d’une perspective grandiose,
- avec l’accord des autorités représentant l’autorité royale française (le maréchal de Belle-Isle, gouverneur des Trois-Evêchés et lieutenant général des duchés de Lorraine et de Bar).
Cela méritait bien une inscription au patrimoine mondial de l’Unesco en 1983 ! Chapeau Héré !
L’arc de triomphe Héré dans les détails
Pour réaliser son arc de triomphe, Héré s’est inspiré de l’arc de Septime Sévère à Rome.
En fait, l’arc de triomphe de Nancy figure parmi les plus anciens arcs post-romains construits en France. Il est contemporain à la Porte de Bourgogne de Bordeaux (1750-1755) et à la Porte de Paris de Nevers (1742-1746).
L’ouvrage Le Vieux Nancy de Pierre Marot (qui n’est malheureusement plus édité) donne une description détaillée de l’arc vu de la place Stanislas :
Il est percé d’une grande baie en plein cintre, flanquée de deux baies plus basses, la partie centrale formant avant-corps. Six colonnes corinthiennes encadrent ces ouvertures et supportent un entablement surmonté d’une frise couronnée de statues.
Comme l’ensemble de la place [Stanislas], l’arc de triomphe est dédie à Louis XV.
Les médaillons
Sur les médaillons timbrant les trophées qui sont placés au-dessus des portes latérales sont gravés les mots : PRINCIPI VICTORI et PRINCIPI PACIFICO ; ces deux inscriptions donnent la clef du symbolisme de l’arc : bas-reliefs et statues célèbrent Louis XV, prince victorieux et pacifique.
Cette symbolique, si elle est davantage marquée sur l’arc de triomphe, se retrouve dans tout le décor de la place [Stanislas], ne serait-ce que par le discret et constant enlacement du laurier et de l’olivier.
La Renommée
Le groupe de bronze, qui est placé au-dessus du monument sur un acrotère, est composé de trois personnages.
Un génie y représente le médaillon de Louis XV ; la Paix le reçoit et la Victoire le couronne.
[Cette Renommée qui tient le médaillon représentant Louis XV est placé au-dessus d’une inscription latine à la gloire du roi de France : HOSTIUM TERROR / FŒDERUM CULTOR / GENTISQUE DECUS ET AMOR que l’on peut traduire par : « Terreur des ennemis, fauteur des traités. Gloire et amour de son peuple ».]
Le médaillon royal actuel, en bronze doré, remplace depuis 1815 (il fut encore retiré de 1830 à 1852), celui qui à l’origine avait été exécuté en marbre par l’Autrichien Jean-Baptiste Walneffer et que la Révolution avait détruit.
Les statues dominant l’arc
De chaque côté de ce groupe se dressent, à gauche, les statues de la Félicité publique et de Minerve, à droite celles d’Hercule et de Mars, la paix et la guerre ; les trois bas-reliefs, qui sont scellés sur l’entablement, représentent, celui de gauche, Apollon jouant de la harpe, au milieu des Muses ; celui de droite, Apollon perçant d’une flèche le serpent Python ; celui du centre la Paix (à gauche) et la Guerre (à droite).
Les modifications ultérieures de la Porte Héré
Au 18e siècle et jusqu’en 1817, il était possible de se promener sur la terrasse de l’arc de triomphe. Or, cette jolie promenade fut rendue possible par le démantèlement du vieux bastion de Haussonville. L’idée était de créer un accès au Parc de la Pépinière depuis la place royale. Aussi, des escaliers installés sur le flanc Est de l’arc permettaient aux promeneurs de flâner le long du chemin de ronde des fortifications.
Toutefois, le bastion de Vaudémont fut entièrement rasé en 1847, rendant possible l’ouverture de la charmante place de Vaudémont.
Ainsi, l’arc de triomphe Héré se retrouva isolé. Une fois les remparts démantelés, la porte devint un véritable arc de triomphe.
Pour la petite anecdote, on peut rapprocher cette situation à celle de la porte serpenoise de Metz, elle aussi isolée depuis la destruction des remparts de la ville.
La façade de l’arc – place de Vaudémont
En lieu et place du bastion d’Haussonville, on ouvrit la petite place de Vaudémont. Avec ses terrasses de restaurant et ses airs du sud (regardez les façades colorées !), elle flanque le flanc ouest de l’arc de triomphe Héré.
Ultérieurement, en 1877, l’architecte Morey accola à l’arc une façade monumentale. On y plaça une statue de Jacques Callot par Laurent, elle-même flanquée des bustes des graveurs Ferdinand de Saint-Urbain et Israël Silvestre.
La façade de l’arc – place Héré
En 1888, on répliqua le modèle de la façade de la place de Vaudémont sur le flanc Est de l’arc.
L’ensemble fut conçu en l’honneur de l’architecte Emmanuel Héré dont on peut également admirer la statue par Charles Jacquot.
L’arc de triomphe Héré by night
La nuit tombée, l’arc de triomphe Héré est magnifiquement illuminé. Ainsi, la Porte Héré est mise en valeur sur ses deux côtés : de la place Stanislas bien sûr, mais également de la place de la Carrière.
De plus, la Porte Héré devient un lieu de passage incontournable pendant les Fêtes de Saint-Nicolas. Elle permet ainsi la connexion entre la place Stanislas et le marché de Noël sur la place de la Carrière.
Monter à l’arc grâce aux visites apéritives de Nancy Tourisme
Les visites apéritives organisées par Nancy Tourisme sont une occasion unique de monter à la terrasse de l’arc de triomphe Héré, habituellement inaccessible. Vous découvrirez la belle perspective de la place Stanislas à la place de la Carrière. Et de nombreux détails architecturaux qui sont difficilement visibles de la place.
D’un côté, vues sur la place de la Carrière et le palais du gouvernement :
Et de l’autre, vues sur la place Stanislas et la cathédrale :
Enfin, il est possible que les visites soient reconduites pour l’été 2020. Pour en savoir plus sur les visites apéritives de Nancy Tourisme…
Pour en savoir plus
Quelques sites sur l’arc de triomphe Héré et Nancy :
- la place Stanislas (sur le blog)
- la place de la Carrière (sur le blog)
- les portes de Nancy (sur le blog)
- 2 jours à Nancy : itinéraire de découverte (sur le blog)
- le site de Nancy Tourisme
- l’article de wikipedia
- le site de Stanislas et Orbi
- le site de l’Unesco sur les trois places classées de Nancy
Si vous trouvez que mes articles vous plaisent ou vous ont rendu service, n’hésitez pas à les partager sur Twitter ou Facebook. Cela me ferait super plaisir, et en plus cela me motive à continuer à en écrire davantage ! 🙂
Inspiré ? Epinglez sur Pinterest :
Vos articles sont exceptionnels ! Un immense Merci !
Merci Josette, ça me fait chaud au cœur ! 🙂
C’est toujours un plaisir de lire les articles de ma ville natale,
j’ai la chance d’avoir le livre du « Vieux Nancy » de Pierre Marot, j’ai donc pu m’y replonger.
Bonne continuation ,et longue vie au site;
Oui ce livre est une référence ! Il y a plein de petites choses que l’on apprend sur Nancy, malgré son ancienneté (années 1930!). Merci pour tes encouragements et à très très bientôt !!!
Comme toujours, encore un article documenté et instructif sur le patrimoine de notre région, même pour un nancéien pure souche comme moi ! Bravo, on attend avec plaisir le suivant !
Merci beaucoup Jacques pour votre gentil commentaire… le prochain article sur Nancy portera justement sur les portes de Nancy ! Bon dimanche à vous ! 🙂
Bonjour Pierre,
Très précieux article sur Nancy.
Lors de la semaine fédérale de cyclotourisme d’Epinal en août 2018 une excursion y a été organisée, mais j’ai été un peu frustrée par notre visite car il y avait tant d’autres choses à voir. En août 2021, cette fois nous serons à Pont à Mousson et j’espère bien faire une visite plus complète de Nancy entre autre.
Bonne continuation et merci pour toutes vos pages si agréables à découvrir.
Merci Danielle ! Je connais Pont-à-Mousson et il y a beaucoup de choses intéressantes à découvrir, de la place Duroc à l’abbaye des Prémontrés en passant par la fameuse Butte de Mousson. Bonne journée à vous ! 🙂
Merci Pierre pour ce bel article sur la Porte Héré
Ravi qu’il vous ait plu ! A bientôt sur le blog ! 🙂
Cher Pierre
Quel plaisir de lire cet article nous décrivant l’arc de triomphe de Nancy
Merci beaucoup pour votre rigueur et tous ces détails qui subliment la visite et nous instruisent avec tant de plaisir et assurément nous donnent très envie de partir dès maintenant visiter cette magnifique ville et d’y rester jusqu’à la nuit pour voir tout s’illuminer !
une belle expérience à tenter dès le printemps quand le vent soufflera moins fort !
c’est assurément notre prochaine destination découverte
Merci beaucoup de nous décrypter toutes ces merveilles qui font de notre France un merveilleux pays si riche en culture et en histoire
Bonne soirée à vous
Sylvie
Merci beaucoup Sylvie de votre gentillesse. Je suis ravi d’apprendre que cet article vous a inspiré à (re)découvrir Nancy !
Et oui, tout à fait d’accord, on attend avec impatience le retour des beaux jours (et moins de vent) pour recommencer les visites ! En vous souhaitant une belle semaine, Pierre