L’Altpörtel de Spire est un des monuments les plus emblématiques de la ville rhénane. C’est aussi l’une des portes de ville les plus impressionnantes des pays allemands, aux côtés de la Martinstor à Fribourg-en-Brisgau, la Spalentor à Bâle (Suisse) et le Dolder à Riquewihr (Alsace). Au 17e siècle, la porte a bien failli disparaître, l’occupant français ayant prévu de la dynamiter. Il a fallu un miracle pour qu’elle ne partage pas le triste sort des fortifications de Spire…
L’Altpörtel, une monumentale entrée dans Spire
C’est une tour que j’aimais beaucoup gravir quand j’habitais Spire. Vers la fin des années 1980, on a réalisé des travaux d’aménagement à l’intérieur pour rendre public l’accès à la galerie supérieure. Pour moi qui aime admirer les villes d’en-haut, j’en ai gardé de bons souvenirs… et malheureusement aucune photo (c’était bien avant l’apparition du numérique !)
Mais comme enfant, j’aimais dessiner, j’ai ainsi immortalisé mon Altpörtel :
La vieille porte (l’Altpörtel) est une des plus hautes (55 m) d’Allemagne. A ma connaissance, elle était la plus haute des portes de ville en Allemagne jusqu’au rehaussement de 1901 des portes fortifiées de Fribourg-en-Brisgau : la Martinstor (66 m) et la Schwabentor (65 m).
On mesure la grandeur du monument de part et d’autre de la porte :
- depuis la Postplatz (la place de la Poste), en venant de Landau et de France.
- depuis la Maximilianstraße, voie triomphale de Spire qui relie l’Altpörtel à la cathédrale impériale.
La Postplatz
La Postplatz (place de la Poste) tient son nom de l’ancienne poste, sur la gauche de l’Altpörtel. L’imposant édifice néo-baroque fut construit en 1901. Remarquez la toiture à la Mansart (« à la mode française« ) avec les lucarnes œil-de-bœuf. Depuis 2012, l’ancienne poste désaffectée est devenue un centre commercial.
La place est très curieuse avec la représentation de trois styles architecturaux différents :
- médiéval (Altpörtel),
- néo-Renaissance (le bâtiment rouge du Altpörtel-Café, 1860)
- et néo-baroque (la poste).
L’Altpörtel de Spire, porte d’entrée dans la cité impériale
Observons maintenant l’Altpörtel de Spire de plus près.
La partie basse est naturellement la plus ancienne… elle fut construite entre 1230 et 1250. Le dernier étage, une galerie avec des arcades de style gothique tardif, fut ajouté entre 1512 et 1514. Enfin, le toit escarpé muni de lucarnes fut monté en 1708. Il est coiffé d’un gros lanternon.
Avec ses meurtrières, la face campagne de l’Altpörtel (depuis la Postplatz) est assez austère. Il est néanmoins orné d’une double horloge.
Sur la gauche, une maison à pignons à volutes de couleur rouge flanque la porte, ajoutant une touche baroque à l’ensemble médiéval.
La face ville (depuis la Maximilianstraße) se révèle moins austère et montre un style plus ouvragé que la face campagne. Deux rangées de larges baies sont surmontées d’une double horloge.
Les Français épargnent l’Altpörtel de Spire
Les troupes de Louis XIV épargnèrent fort heureusement l’Altpörtel en 1689, lors de la Guerre de Succession du Palatinat.
Les circonstances du sauvetage de l’Altpörtel implique justement les troupes françaises qui occupaient Spire en 1689.
Le maréchal Duras avait bien prévu de démolir la tour en y faisant placer des explosifs. Mais le monastère des Carmes, situé à proximité, avertit le maréchal français que l’effondrement de la tour pourrait mettre en danger :
- le monastère lui-même
- et surtout le siège de commandement français établi non loin de là.
Duras répondit aux moines qu’ils n’avaient rien à craindre. Les soldats français savaient comment dynamiter l’édifice sans danger.
Des Carmélites tenaces
Mais les Carmélites insistèrent. Ils se mirent à genoux devant le Français en plaidant :
« La structure de notre monastère est vieille et faible. La chute de la tour provoquerait l’effondrement de notre propre édifice. Puissiez-vous montrer compassion et épargner la tour ».
Après réflexion, le maréchal leur répondit :
« Relevez-vous, la tour restera en l’état ».
Etrange décision alors que le reste de la ville de Spire, dont la cathédrale, n’étaient plus qu’un tas de gravats.
L’Altpörtel reste donc l’un des rares témoignages des fortifications médiévales de Spire. Le mur d’enceinte de la Ville impériale comprenait quelques 68 tours et portes fortifiées.
La vue depuis l’Altpörtel de Spire
Je vous recommande de monter les marches jusqu’aux arcades. A 30 mètre au-dessus du sol, vous serez récompensé par une vue superbe sur la ville et ses alentours.
En montant les escaliers, vous franchirez une succession de niveaux. Certains abritent des salles d’exposition comprenant des panneaux explicatifs sur l’histoire du monument et des fortifications de Spire.
Une fois arrivé en haut, vous n’avez qu’une lourde porte à pousser pour vous retrouver sur la galerie. Le panorama est à coupler le souffle.
D’un côté, la Gedächtniskirche et l’église Saint-Joseph, et en arrière-plan les montagnes du Palatinat, de Landau à Bad Dürkheim.
De l’autre côté, les monuments du centre historique de Spire de part et d’autre de la Maximilianstraße jusqu’à la célèbre cathédrale. Au loin, les montagnes de Heidelberg et, au nord, les industries de Ludwigshafen et Mannheim.
Passons de l’autre côté de l’Altpörtel en entrons dans le centre historique de l’ancienne Ville impériale.
La Maximilianstraße, la Voie Triomphale de Spire
A Spire, on n’avait pas besoin d’Haussmann pour créer des percées dans le tissu urbain médiéval !
Car depuis le 11e siècle, Spire possède sa Hauptstraße. Bien plus qu’une Grande-Rue, il s’agit ici d’une vraie Voie Triomphale, une Via Triumphalis.
Longue de 700 m, elle est délimitée par deux monuments : l’Altpörtel à l’ouest et le Kaiserdom (cathédrale impériale) à l’est.
Lors des grandes fêtes religieuses, l’empereur accompagné de sa cour l’arpentait en procession.
Maximilien et sa French connexion !
En 1816, la rue prit le nom de Maximilianstraße, d’après Maximilien Ier (1756-1825), le premier roi de Bavière.
Maximilien de Wittelsbach grandit à Strasbourg et fut également comte de Ribeaupierre (Ribeauvillé) en Alsace. Le parrain de son fils ainé Louis n’était autre que Louis XVI.
Aujourd’hui, la rue a une vocation commerciale. On y trouve de nombreux magasins et boutiques.
Les célébrations des 2000 ans de Spire en 1990 furent l’occasion d’interdire le traffic automobile sur la Maximilianstraße. Cela eut pour conséquence l’apparition de nouvelles terrasses de cafés.
Vous y découvrirez les traditionnels vendeurs de Bretzels, un des emblèmes de Spire.
Les monuments de la Maximilianstraße
Entre l’Altpörtel de Spire et la cathédrale impériale, la rue est bordée de plusieurs maisons à pignons du 18e siècle. Aucune maison ne date d’avant l’incendie de 1689 causé par les troupes françaises. Il existe très peu de maisons à colombages (numéro 86 – datant de 1700, Baroque tardif) car après l’incendie de 1689, on a préféré reconstruire en pierre.
Trois édifices majeurs ponctuent la rue commerçante :
L’Alte Münze (numéro 90), l’Hôtel de la Monnaie qui marque en quelque sorte le centre la rue, entre l’Altpörtel et la cathédrale.
La Rathaus (numéro 12), ce bâtiment de style baroque tardif est reconnaissable à sa façade rouge. Il abrite la mairie de Spire.
La Stadthaus (numéro 100), un imposant bâtiment néo-Baroque datant de 1903, construit en grès rouge de carrières en Lorraine.
Pour aller plus loin, découvrez mon article sur la cathédrale impériale de Spire.
Pour en savoir plus sur Spire en Allemagne
- Les parcours de visite de Spire
- Mon article détaillé sur la cathédrale de Spire : symbole impérial en Allemagne.
- Mon article détaillé sur la Gedächtniskirche de Spire, l’église commémorative de la Protestation
- Le site officiel de la Ville de Spire (en allemand ou en anglais – eh non, il n’est pas disponible en français !)
- La page Wikipedia sur Spire
- La liste des hébergements pour organiser votre séjour à Spire
- Retrouvez sur Instagram les plus belles photos de Spire sur les profiles suivants : VisitSpeyer et ILoveSpeyer. Idéal pour vous donner une idée du patrimoine spirois !
Une épingle pour Pinterest
Avez-vous visité Spire ? Si oui, qu’est-ce qui vous a plu dans sa découverte ? Dites-moi tout ci-dessous 🙂
Bonjour Pierre
Bien que j’ai aimé beaucoup de tes articles , celui-ci est un de mes préférés. Il m’a rappelé de bons souvenirs . Du coup, je retournerai bien y faire un petit séjour !
Oui, vivement qu’on puisse voyager à nouveau pour re-découvrir ces beaux endroits… et notamment Spire ! 🙂